Il devait vers les 23h du soir. J'avais passé une journée de dingue entre les concerts et les bars, sans oublié les fêtes. Il est vrai qu'à présent j'étais vraiment bien fatiguée. Heureusement que je me forçais à remanger depuis deux mois et que j'avais repris du poids depuis la crise avec Keith. Bon par contre, mes cauchemars ne s'arrangeaient pas, mais je n'y pouvais sur ce plan là rien. Rien que de penser à mes cauchemars, je me rappelai que j'allais d'ailleurs bientôt devoir poser ma tête sur mon oreiller, sous la tente que j'avais galéré à installer, avec finalement l'aide de mon voisin. Merci voisin inconnu de tente.

Normalement, j'avais bien prit mes somnifères mais la n'était pas la question. A force d'avoir trop bu et d'avoir surtout trop fait la fête, tout cela m'avait donné soif. Aussi, avec ma gourde en main, j'étais partie en direction du point d'eau où il y avait normalement des robinets pour remplir ma super gourde. Bon, faut que je me calme. Mais pour tout vous dire, il avait beau être 23h, il faisait encore chaud, si bien que je me baladais en short et débardeur, des tongues aux pieds, et que marcher à travers le camping me donnait de plus en plus soif.

Je réussis finalement à trouver un point d'eau. Je bus directement au robinet avant de remplir ma gourde d'eau pour la nuit, une fois ma soif étanchée. Je vis alors une silhouette se diriger vers la fontaine, sans doute pour boire lui aussi. C'était celle d'un jeune homme que je ne reconnaissais pas. Lorsqu'il arriva enfin près de la fontaine, je n'avais pas encore finit de remplir ma gourde. Je lui fis alors un sourire en coin, comme une sorte de "bonsoir" et de "excuses moi". Pour tout vous dire, maintenant que je le voyais à la lumière, il était mignon, mais semblait plutôt réservé. Qui pouvait-il bien être ?

Je sentis que ma gourde était enfin remplie. Je fermais alors le robinet, mais c'est à ce moment la que la gourde m'échappa des mains, et en tentant de la rattraper, l'eau se déversa alors sur mes vêtements.

- Et merde ! Oh j'en peux plus. Mais vas y, dis-je au jeune homme, je la remplirais après.

Je ramassai alors ma gourde désormais vide. Mais bon, le jeune homme attendait et j'allais pas le faire attendre encore plus à cause de mes maladresses. J'étais vraiment fatiguée ce soir pour ne plus arriver à tenir une gourde en main. Je me décalai de la fontaine pour laisser boire le jeune homme. Bon ba, plus qu'à attendre. Et en plus de cela, trempée. Ah je vous jure ! En faite, je serais bien mieux sous mon duvet dans ma tente.

Mais je devais attendre. Ah, qu'est-ce que ça peut m'énerver ! Et voila, maintenant je stresse. Calme, calme, calme. Je sortis alors mon paquet de cigarettes et mon briquet. Je pris alors une clope et l'allumai. Puis je regardai le jeune homme. Il semblait avoir soif le pauvre. Je réarrangeai rapidement mes cheveux d'un coup de main, mes cheveux que j'avais laissé détaché. En tout cas, il me semblait amical, alors pourquoi essayer de taper la causette. Oui, il se fait tard et je suis trempée, mais l'alcool fausse souvent mon jugement sur ce genre de détaille, comme maintenant. Aussi, lorsqu'il eut finit de boire, je lui tendis alors mon paquet de cigarette en lui disant, histoire de casser la glace :

- Tu en veux une ?

- Christian Washington

Washington... Comme la capital des Etats-Unis ? Original au moins. En tout cas, c'est noté ! Je peux enfin coller un nom à ce joli minois : Christian. Tiens, ça me fait penser à quelque chose en vogue mais je ne sais plus quoi. Bref passons, là n'est pas le plus important. Je lui répondis alors par un léger sourire. Il finit par de lui même rebriser ce petit silence qui c'était installé entre nous.

- T'es ici depuis longtemps ?

Ici ? Ici où ? Au festival ou au Canada ? Si c'était au festival, je n'y étais que depuis quelques heures. Mais si c'était au Canada... Voyons, depuis combien de temps mes parents adoptifs m'ont-ils envoyé ici ? Un an ? Deux ans ? Je crois que ça fait un peu plus d'un an comme même. Ah les jours se suivent et se ressemblent en plus, si bien que je perds la notion du temps parfois.

- Je suis au Canada depuis un peu plus d'un an. Mes parents m'y ont envoyé pour que j'étudie à l'Université Enamor, qui se trouve à Montréal, même si j'aurais préféré rester à Manhattan à vrai dire. Au moins, là-bas, j'ai tous mes potes, alors qu'ici... Enfin bref. Et toi ? Ca fait combien de temps que tu es au Canada ?

Je repris alors une taff sur ma cigarette. En tout cas, bien qu'il semblait très réservé, je sentais que ce petit Christian commençait légèrement à se décoincer. Il ma sourit, faiblement, mais il m'a sourit. A ce que j'aimerai casser se mur invisible entre nous qui le retient autant. Parfois j'aimerai que tout le monde soit bourré pour pouvoir discuter librement sans toutes les contraintes qu'impose la société et l'éthique.

- Je suis né à Toronto, mais je suis à Montréal depuis bientôt cinq ans.

Ah donc il est d'origine Canadienne si je comprends bien, car de mémoire, Toronto est situé au Canada. Enfin, après, peut-être que je me trompe car j'ai jamais été douée en géographie pour tout vous dire. Enfin bref. En tout cas, le voir sourire me fit comme du bien. Je sentais qu'on partait sur quelque chose de bien tout les deux. Qui sait, un nouvel ami peut être ? Et puis il habitait à Montréal dont peut être était-il dans mon université. En tout cas, me faire un nouvel ami ne peut apporter que du positif dans ma vie. Déjà, ça me permettra de ne pas tout décharger sur Keith. Et puis, je sais pas, mais je crois que j'en ai besoin, d'avoir des amis.

Alors que je tirai de nouveau sur ma cigarette, le jeune homme se pencha alors vers moi pour retirer mes cheveux, coincés dans son pull. Je le laissai faire, sans rien dire. Puis lorsqu'il eut enfin dégagé mes cheveux, il tourna alors ses yeux vers moi. Je le regardai, sans bouger, attendant de voir. Il fallait reconnaître que la distance actuelle entre nous était... courte. Son visage était à une dizaine de centimètre du mien. Je passai de son oeil droit à son oeil gauche pour revenir au droit, ne sachant pas lequel regarder. Cette situation dure quelques bonnes dizaines de secondes, ne sachant pas quoi faire l'un comme l'autre.

Il fallait l'avouer, il était vraiment mignon, surtout de près, avec ses yeux marrons pétillants et son air angélique. Mais on venait à peine de se rencontrer. Je finis par baisser les yeux puis légèrement le visage avant de sourire, le rouge légèrement aux joues. Puis je réussis à lui formuler un " Merci. "

Faut sortir de cette situation. Pas que je n'ai pas envie de l'embrasser, au contraire. Mais je préfère, avec lui, y aller en douceur. Je sais pas, mais je sentais que Christian était quelqu'un de spécial, avec qui je pourrais sûrement bien m'entendre. Aussi voulais-je ne pas faire de gaffe comme parfois j'en faisait avec de nouvelles connaissances, car oui, j'avais déjà embrassé plusieurs mecs que je venais de rencontrer. Bon, le plus souvent, j'étais totalement bourrée, faut l'admettre.

J'eus alors une idée. Bon, elle était pas génial, mais au moins, ça permettrai de détendre complètement l'atmosphère. Je relevai alors mes yeux vers le jeune homme, un léger sourire espiègle à mes lèvres. De ma main droit, je cherchai en tâtonnant le robinet. Je réussis à le trouver, l'ouvrit puis mouilla mes doigts. J'eus alors un léger mouvement de recul avant de lancer de l'eau au visage de Christian. Fière de ma farce, et à présent à distance raisonnable de lui, je me mis alors légèrement à rire, attendant sa réaction, tout en restant sur le qui vive pour détaller au moindre danger d'être arrosée à mon tour bien sur !

Christian réagit par un petit cri de surprise lorsqu'il reçut l'eau au visage, ce qui me fit sourire de plus belle. Il me regarda, un sourire splendide aux lèvres, se demandant comment m'atteindre avec la distance qui nous séparer à présent. Il fit alors une chose à laquelle je ne m'attendais pas : il enleva son débardeur. Mais pourquoi ? En tout cas... Heu, hum, faut que j'arête tout de suite de me rincer l'oeil, surtout, que... Pourquoi il avance vers moi avec son tee-shirt en main, qui semblait... mouillé ? Ah non ! Voila, pourquoi a-t-il fallut que je le regarde lui plutôt que ce qu'il faisait.

Avant que je ne puisse réagir, il essora son tee-shirt trempé sur moi. J'eus alors un geste de recule, essayant de me protéger avec mes mains, tout en poussant un léger cri :

- Ah ! Non, arrêtes !

Mais mon sourire me trahissait complètement. En fait, cette situation m'amusait beaucoup. Aller ! Bataille d'eau ! D'un coup d'oeil, je réussis à repérer ma gourde, toujours par terre dans l'herbe. Avant qu'il ne comprit de quoi il en retournait, je courus vers elle, la ramassais puis fit face à Christian, toujours ce fameux sourire aux lèvres. Je débouchais alors ma gourde et lui lançai un regard plein de défit en lui disant, presque en riant :

- Vas y, je t'attends ! Viens prendre ta douche si tu l'ose !

- Non, non, c'est bon !

Sûr ? Pourtant j'ai l'impression qu'un peu d'eau pourrait juste te faire le plus grand bien. Il partit alors en courant et je me mis à le poursuivre. Bon, courir avec une gourde pleine et ouverte à la main n'est pas la meilleure des idées, aussi reçus-je quelques éclaboussures sur les mains. Mais F*ck it ! De toute manière, je m'en fou, je suis déjà mouillée alors... N'empêche, il court vite !

Puis soudain je vis Christian trébucher et s'étaler à plat ventre sur le sol. Ouïe. Je le rejoignis alors en quelques foulées et m'arrêtai au dessus de lui, indécise. Est-ce que je l'arrose ?

- Je veux bien une douche, en fait..., me dit-il en riant

Fallait pas dire ça car on ne me pris pas deux fois pour ça, surtout pour ça. Je versai alors la moitié du contenue de la gourde sur la tête de Christian, un sourire espiègle aux lèvres. Ah sérieux ! Je ne m'étais jamais autant amusée depuis quelques mois. A quand remontait mon dernier fou rire ? Surement durant une soirée bien arrosée mais dont je ne me souvenait probablement plus.

Je m'assis alors à coté de Christian, dans l'herbe, quelque peu à bout de souffle. Décidément, la cigarette, ça n'aide pas à courir. D'ailleurs qu'ai-je fais de la mienne ? Probablement tombée au moment où il m'avait arrosé. De toute manière, je pense que l'eau qu'il m'avait balancé l'avait éteinte avant qu'elle tombe, donc pas grave. Je repris alors mon souffle, regardant le jeune homme, toujours un sourire au lèvres.

- Pourquoi tu me fixes ?

Je secouai doucement la tête et lui répondit par un " Je sais pas " avant de regarder alors mes mains. C'est vrai ça, pourquoi est-ce que je le fixais ? Vas savoir ! Je fais souvent des trucs bizarre moi de toute manière. Je bus alors quelques gorgées à ma gourde. Mine de rien, courir m'avait donné soif dans tout ça. Je fermai ensuite la gourde, une fois que j'eus fini de me désaltérer. Puis je la posais à coté de moi.

Je me mis alors à regarder au loin, ne sachant quoi fixer. C'est alors qu'un groupe de trois filles passèrent, complètement péter. Mon dieu, c'est à ça que je ressemble lorsque je suis bourrée ? En tout cas, elle ne marchait pas droit, manquaient de tomber à chaque pas et était complètement morte de rire tout en cafouillant des trucs incompréhensible. J'essaye même pas d'imaginer ce qu'elles ont bien pus prendre pour se retrouver dans un tel état. Soudain, l'une cria et j'échangeai alors un regard interrogateur avec Christian, en mode genre : "Qu'est-ce qu'il lui prend à celle la pour gueuler comme ça" avant d'esquisser un sourire. Sérieux, elles faisaient vraiment pitié.

Une fois qu'elles furent parties, le silence se réinstalla entre nous. Il faisait à présent totalement noir, il n'y avait que la lumière de la lune pour nous éclairer, ainsi qu'un lampadaire un peu plus loin. Ca faisait du bien un peu de calme. Dire que dans quelques heures, j'allais devoir prendre mes somnifères et affronter de nouveau mon père en rêve. Mais comme je me l'étais promis, je devais rester forte. Un jour viendra ou je vaincrai mes démons et affronterai mon père. Jamais je ne reviendrai chez lui, jamais. Pas après avoir compris toute l'horreur qu'il m'avait fait subir. J'avais croisé machinalement mes bras contre ma poitrine, comme si ça pouvait me protéger. Mais bien sur, il n'en été rien.

Je les décroisais et m'allongeai alors dans l'herbe. Je fixai alors le ciel étoilé. J'aimerai bien voler et aller toucher les étoiles, aller marcher sur la lune. Je savais que les étoiles étaient des soleils très lointains, je n'étais pas dupe. Mais marcher sur la lune, ça peut être bien, non ? En tout cas, c'est toujours mieux que de rester ici à redouter l'arrivée de mon père. Mais déjà, en terme général, voler, ça devait être une expérience fantastique !

- J'aimerai bien pouvoir voler. Je ne sais pas où j'irais, mais ça serait fantastique ! dis-je tout haut sans m'en rendre compte.

- Je crois que j'aimerais pas. Je finirais par avoir le vertige, et je vomirais sur la tête de quelqu'un.

Ca phrase me fit juste sourire. C'est vrai que de ce point de vue là, ce n'était pas super de savoir voler. Vomir sur quelqu'un ne doit pas être fort agréable. Mais l'idée est amusante n'empêche. Ok, non, laisser tomber, j'ai plus tout à fait les idées claires de toute manière. Mais la question se posait tout de même : si je pouvais voler, est-ce que j'en serais moi aussi malade ? A vrai dire, je n'avais pas vraiment le vertige. Mais voler devait être une toute autre expérience que de se tenir sur un balcon a 20m de haut. Donc à vrai dire, j'en sais rien.

Soudain, je le sentis se rapprocher de moi. Du coin de l'oeil je le regardai et cela confirma ma sensation. Mais pourquoi se rapprochait-il ? Bonne question à laquelle seul lui à la réponse. Puis tout à coup, il fit une chose à laquelle je ne m'attendais mais alors absolument pas : il m'embrassa sur le joue. Sur le coup, je fus légèrement surprise, même si je ne le laissai pas paraître. Mais juste après, je me mis à rougir. J'avais eu beaucoup d'amis garçons, voir même que ça, des potes avec qui je traînais tous les jours dans les rues de Manhattan et de New York. J'avais eu aussi pleins d'aventures amoureuses - bon très courte, histoire d'un jour ou deux, souvent avec un gas ramené d'une boite de nuit. Mais jamais je n'avais eu de relation sérieuse avec quelqu'un, jamais.

Je jetais alors un coup d'oeil au garçon. Celui ci avait détourné le regard, l'air de rien. Dans la nuit, je ne pouvais pas voir si il rougissait ou pas, mais je le présumais tout de même. Mais pourquoi avait-il fait ça ? Non loin que ce ne soit pas agréable, au contraire, mais c'était si soudain. Pourtant, il m'avait semblé plutôt réservé comme garçon. Je m'étais peut être trompé sur son compte après tout. Et vous croyez que si... Non, il ne vaut mieux pas.

Soudain je me mis à trembler. Le contre coup de l'eau et de la nuit ma belle ! Effectivement, la fraîcheur de la nuit était finalement tombée et mêlé à mes cheveux trempés, j'eus soudainement très froid. Je me blottis alors machinalement contre la source de chaleur qui se trouvait à coté de moi, c'est-à-dire, Christian. Lorsque je m'en rendis compte, en fait, cela ne me gênait pas tant que je l'aurais penser. C'était certes un "inconnu" mais je l'appréciais de plus en plus ce jeune homme. Même si il fallait l'avouer, cette situation était bizarre. Mais j'ai froid, que voulez vous ! Je lui dis alors machinalement, comme pour justifier mon acte :

- J'ai froid.

- Tu vas vraiment tomber malade...

Ce qu'il disait n'était pas faux. Il m'avait prit dans ses bras et me serrais contre lui mais sous mes doigts, la peau de son torse était à la fois plus chaude que l'air extérieur mais aussi plus froide que la vraie température corporelle habituelle. Il devait sans doute avoir froid lui aussi, surtout qu'il était complètement torse nu. Il se mit alors en position assise, et moi de même par la même occasion. Puis il se colla de nouveau contre moi, essayant de me donner le maximum de chaleur. Sur le coup, je le considérais presque comme le frère que je n'avais jamais eu : s'inquiétant pour moi et me protégeant à chaque instant. Je le sentis passer ses doigts dans mes cheveux et cela me fit légèrement rougir : je ne savais pas comment interpréter ce geste car personne avant ne me l'avait fait.

- Tu veux peut-être rentrer ? Pour chercher une serviette...

Une serviette. Rien que l'idée de m'emmitoufler dans une serviette ne pouvait me faire plus plaisir. Et pour lui aussi, il vaudrait mieux rentrer par la même occasion, avant qu'il n'attrape froid à son tour. Toujours collée contre son torse, je hochais la tête avant de lui dire un petit " Oui ". Mais j'étais incapable de me décoller de lui, aller savoir pourquoi. Son odeur était agréable, rassurante. Sa présence toute entière était réconfortante. J'avais l'impression que jamais plus un cauchemar ne pourrait venir me hanter tant que je reste dans ses bras. Que tant qu'il restait à mes côtés, jamais mon père ne pourra m'atteindre. C'est ça, avoir un frère ? Se sentir en sécurité et protégée ? Je fermai les yeux et posai mon front sur son épaule. J'aurais aimé rester ainsi pour toujours. Mais mes tremblements me ramenèrent à la réalité.

Aller, quand il faut y aller, faut y aller. Penses à cette formidable couverture qui attend, à ces vêtements chauds... Mais avant de me mettre fin à notre étreinte et me relever, je tournai la tête et embrassai Christian sur la joue. Ouai, j'avais l'impression de me découvrir un nouveau frère. J'avais eu beaucoup de pote, mais jamais de frère pour tout vous dire, et c'était vraiment étrange de se sentir si proche d'une personne alors qu'on vient juste de la rencontrer. Une fois debout, je récupérai ma gourde, puis je croisais mes bras contre ma poitrine, toujours tremblante.

- C'est par là, dis-je à Christian en pointant rapidement la direction dans laquelle se trouvait ma tente.

Christian fit alors une nouvelle chose à laquelle je ne m'attendais pas : il passa une main dans mon dos, l'autre derrière mes genoux et me souleva. Décidément, ce garçon était plein de mystère et de surprise. D'apparence, on dirait quelqu'un de réserver, mais en fait, loin de la. C'était même quelqu'un de plutôt amical, et surtout protecteur. Je passai alors la ficelle de ma gourde à mon poignet, histoire qu'elle pendouille dans le vide, accrocher à moi, puis je passai mes deux mains autour du coup de Christian pour assurer sa prise sur moi.

- J'avais envie d'être galant.

Cela me fit sourire, limite rire. Maintenant je pouvais aussi rajouter galant à la liste. Il commença alors à marcher en direction de ma tente. Je fermai les yeux et posai ma tête contre lui, me laissant bercer par le rythme régulier de son pas. Sous ma joue, son corps était froid mais sa peau agréable. Je dormirai presque bien la, dans ses bras. Mais soyons raisonnable, lui comme moi voulions retrouver la chaleur de vêtements et d'une couette.

Le voyage dura quelques minutes. La dernière fois qu'on m'avait porter comme cela, c'était mon pote Keith, parce que j'étais complètement bourrée et à bout de force, ne mangeant plus rien à ce moment là. Et à vrai dire, si Keith n'avait pas été là à ce moment là, j'aurais surement dormis à même le sol dans le parc. Mais là, c'était différent, c'est volontaire, choisit. Et c'est cela qui est agréable : se laisser porter par quelqu'un parce que ça lui fait plaisir et nous aussi. Voyant qu'on arrivait près des tentes, je lui indiquait à voix haute où elle était, enfin j'essayai.

A vrai dire, toutes les tentes dans la nuit se ressemblaient. Il fallut donc un peu de temps et quelques allés-retours pour retrouver ma tente. Je m'excusais alors auprès du jeune homme avant qu'il ne me fasse descendre de ses bras. Une fois les pieds au sol, je me rendis compte que je n'avais pas encore enlever mes bras d'autour son coup. Je relevai alors la tête vers le jeune homme et la sienne se trouvait désormais à quelques centimètres de la mienne. Encore la même situation que tout à l'heure. Mon coeur battait la chamade et je sentis le rouge me venir aux joues. Pourquoi étais-je dans un tel état alors que ce n'étais pas la première fois que je me retrouvais si près du visage d'un jeune homme ?

Je sentis alors sa main contre ma joue. Elle était froide et ça me ramena quelque peu à la réalité. Mais qu'étais-je entrain de faire ? On était si proche... Etait-ce que je voulais ? Au plus profond de moi, oui, même si on c'était à peine rencontré. Je le connaissais à peine et pourtant je me sentais attirer par lui. Mais si toutes ces émotions, toute cette attirance que j'éprouve à son égare n'était que superflu ? Je ne voulais pas lui faire de mal. Après tout, il semblait être quelqu'un de bien et ne méritait pas de souffrir autant que j'ai souffert. Bon j'y vais peut être un peu fort, mais je ne voulais faire souffrir personne, je ne voulais pas ressembler à mon père.

Mais sa main. Son contact sur ma joue réveilla en moi un sentiment jusqu'alors inconnus. Pourtant ce n'était pas la première fois qu'un gas me touchait. Mais c'était différent, peut être parce que je n'étais pas bourrée. J'avais peut être plus conscience de mes émotions qu'à l'habitude. C'en était troublant. Il rapprocha son visage du mien jusqu'à coller son front contre le mien. Que faire ? Pour son contact était si rassurant, et tellement normal. Pour moi, rien ne me semblait bizarre, comme si c'était normal d'être aussi proche l'un de l'autre, comme si toutes les normes sociales n'existaient pas. Je pouvais sentir son odeur, son parfum enivrant. Ce mec me faisait littéralement tourner la tête. Je n'arrivais plus à déterminer ce qui était bien ou non.

- Je crois que j'ai envie de t'embrasser...

A ses paroles, j'eus soudain très envie de réduire cet espace entre nos deux corps, coller mes lèvres contre les siennes et ne faire plus qu'un avec lui. Je commençais même à les rapprocher. Mais au moment ou elles se frôlèrent, je me retiens. En me rapprochant autant de lui, ne le mettais-je pas lui aussi en danger ? En danger de mort ? Comme tous les autres ? Mille question incluant mon père et ce qu'il était capable de faire se bousculèrent dans ma tête, alors que mes lèvres frôlaient celles de Christian. Mais son parfum était tellement enivrant que mon désir prit le dessus et je réduit le peu d'espace qui nous séparait encore, collant mes lèvres contre les siennes sans plus aucune hésitation.

Je ne sus dire ce que je ressentais à ce moment là tellement que tout était confus. Mais une seule idée émergea dans mon esprit : je ne voulais qu'aucun mal ne lui soit fait. Et cette idée m'arrêta alors brusquement dans mon geste et je me séparai de Christian, m'éloignant d'un pas. Aucun mal. Et pour cela, il valait mieux qu'il sorte de ma vie, qu'il m'oublie. C'est un moindre mal que de se faire tuer par ma faute de la main de mon père. Rouge et confuse, je lui dis alors :

- Je suis désolée, mais il ne vaut mieux pas qu'on se revoie...

Ma voix s'étrangla dans les derniers mots et je refoulais quelques larmes. L'idée de devoir le quitter à jamais pour le protéger me rendait limite malade. Mais pourquoi ? On se connaissait à peine ! Ce n'est pas normal. J'enlevai le pull de Christian et le lui rendit en lui murmurant un merci avant de me glisser dans ma tente, les larmes aux yeux. Qu'ai-je fais ? Je m'assis sur mon matelas et fondit en larmes, en silence, sans aucun sanglot. J'avais enfin trouvé un refuge et me voilà entrain de le quitter. J'étais vraiment cruelle, et envers lui, et envers moi même.