Soirée chez James, dans la maison de ses parents, laissée pour l'occasion. Mon dieu, ce qu'on s'éclate. On arrête pas de boire, on plonge dans sa piscine, on profite de son jacuzzi, on parle fort, la musique est à fond. Une sacrée soirée. En plus de ça, y a la jolie Nikki. Une fille que j'ai rencontrée à une soirée précédente et qui, il faut l'avouer, est très loin d'être un thon. Très, très loin. J'avoue qu'elle a tendance à ne pas me laisser indifférent. On ne s'est jamais parlés très longtemps, mais je suis sûr et certain qu'on pourrait devenir de très bons amis.

Au bout d'un moment, on a tous la très bonne idée commune de sortir dans la forêt juste à côté, pour y faire un cache-cache. C'est le jeu qui marche à chaque fois, de cinq à cinquante-cinq ans voire plus. Je sais pas vous, mais moi je m'éclate à chaque fois. Surtout dans ce genre de situations, sur un gros terrain, et en pleine nuit. C'est le moment idéal pour le gros malin que je suis de faire des conneries et de faire chier les gens. Mouahahahah, c'est parfaait.

On s'enfonce tous dans la forêt, plus ou moins loin, alors que James commence à compter. Pour ma part, je marche jusqu'à ne plus être éclairé par les lumières de la maison, seulement celle de la lune. C'est pas drôle, sinon. Et puis du coup, ma victime en sera d'autant plus terrifiée qu'elle ne m'aura pas vue arriver. Je m'accroupis près d'un talus, et attends, à l'affut d'un courageux qui oserait s'aventurer aussi loin.

Et quelle surprise. Le fameux courageux est donc une demoiselle : Nikki. J'aurais pas pu rêver mieux. Elle cherche des cachettes les unes après les autres, sans me remarquer. Faut dire que je suis bien caché, là. Au bout d'un moment elle se retrouve visiblement un peu paumée, elle a l'air de tourner en rond. C'est le moment idéal pour faire mon entrée.

Discrètement, je me faufile jusqu'à elle, puis saute brusquement dans son dos, l'attire jusqu'à moi en la prenant par la taille, et me sers de ma main libre pour couvrir sa bouche. Je colle alors ma bouche à son oreille et lui chuchote le plus froidement et le plus calmement du monde : Si tu cries, t'es morte, ok ?

Je risque tellement gros en faisant ça, mais ça en vaut la peine je pense. Enfin j'espère, huhu.

L'été c'est certainement la période pendant laquelle je sors le plus. En même temps, j'peux pas franchement trop le reste de l'année, parce que contrairement à d'autres, j'm'applique vraiment en cours. J'me fais pas remarquer à jouer à la débile ou à montrer mon cul comme les Garnet, ou encore jouer la superwoman comme ces parfaits Moonstone. Pas mon style du tout. Bref. Tout ça pour dire que j'suis en soirée chez l'ami d'un ami. J'le connais pas hyper bien, j'me rappelle à peine de son nom, à ce mec, mais bon. On s'amuse bien chez lui c'est le principal. J'risque juste d'avoir un peu mal au crâne demain matin hm.

Et j'commence aussi à me demander pourquoi j'étais partante pour ce cache-cache géant dans la forêt toute aussi géante d'à côté la maison. Déjà parce qu'il fait noir comme dans le trou du cul d'une poule qu'a pas pondu, mais aussi parce que j'vais me niquer les jambes à cause des ronces. Parce que ouais, c'est l'été, il fait chaud, alors j'suis en short. Et là en l'occurrence j'porte juste un haut de maillot, et un gilet tout fin. Alors en fait j'vais m'écorcher partout lolilol. Et là. Je me paume littéralement.

J'ai voulu faire ma maline en m'éloignant bien loin histoire d'être tranquille, sauf qu'y a pas de cachettes vraiment cachées, et que j'arrive juste pas à retourner sur mes pas. En gros je tourne en rond et je réussis pas à retrouver mon chemin. Ça m'énerve. Foutu sens de l'orientation que j'ai pas. Je passe mes mains dans mes cheveux, carrément découragée. Merde merde merde. Et j'ai même pas mon téléphone sur moi. Mais quelle conne.

Une main se plaque soudainement sur ma bouche, un bras passe autour de ma taille et j'me retrouve contre quelque chose de chaud, et plus grand que moi. "Si tu cries, t'es morte, ok ?" on me murmure. Je frôle la crise cardiaque, et heureusement que le gens a sa main devant ma bouche pour étouffer mon cri de surprise, sinon je serais 'morte'. Mais mon premier réflexe est de balancer mes bras en arrière. Je réussis à me dégager sans trop de mal pour faire face à mon agresseur, qui se trouve être Monsieur Howard. Oh merde le pauvre. Mais il lui prend quoi, aussi, à cet abruti bordel ?

- Ça va pas non ? J'étais à deux doigts de mourir de peur ! T'es con, Howard, je fais en reprenant mon souffle et en essayant de calmer les battements de mon coeur. J't'ai fait mal ? J'suis désolée, je m'excuse en attrapant son visage entre mes mains pour regarder si j'lui ai pas crevé un oeil. T'es qu'un abruti Damon, ça t'apprendra à me foutre la trouille comme ça, je grogne.

Bon bah j'ai voulu faire le malin, et j'aurais pas du. J'ai joué, j'ai perdu, ahah. Aussitôt, Nikki balance ses bras en arrière, et je me prends un coup en pleine tronche. Encore. Ma pommette commençait à peine à cicatriser, et voilà qu'elle se refait fragiliser. Mon pauvre visage. Forcément, au moment même où je reçois le coup, je lâche la brune. Je tiens pas non plus à me faire boxer, mh. Elle se retourne directement, et se rend compte de ma connerie. Coucou Nikki, c'est moi, oui oui. "Ça va pas non ? J'étais à deux doigts de mourir de peur ! T'es con, Howard." J'ai beau avoir un peu mal - parce qu'elle a bien cogné, mine de rien -, je ne peux pas m'empêcher de rire.

Elle s'approche alors et prend mon visage entre ses mains, afin de vérifier que je n'ai rien de cassé. Rien de cassé, c'est sûr, mais ça brûle un peu, quoi. Ça me lance, comme si quelqu'un avait un petit marteau et s'amusait à me cogner un même endroit à un rythme régulier. "J't'ai fait mal ? J'suis désolée. T'es qu'un abruti Damon, ça t'apprendra à me foutre la trouille comme ça." Elle ronchonne. Et moi, je m'amuse bien. C'est marrant, elle est tout près. Si je le voulais, je pourrais facilement l'embrasser. La situation s'y prête assez bien, en plus. La proximité, le fait qu'on soit que tous les deux, isolés, dans un noir quasi complet, et elle vient de me cogner, ce qui me donne une charge de revanche. Je pourrais, ouais, mais pas maintenant. C'est pas que j'en ai pas envie, au contraire. Mais ça va, je pense que je lui ai assez fait peur pour l'instant, inutile de passer pour un réel psychopathe avide de rassasier son appétit sexuel.

Au lieu de ça, je me permets tout juste de passer une de ses mèches de cheveux derrière son oreille. La lune est suffisamment lumineuse pour que j'arrive à voir cette fameuse mèche devant son œil, qui me perturbe un peu, et qui me donne surtout une bonne excuse pour un léger rapprochement. Faisons les choses bien, n'est-ce pas. Puis, sans lâcher mon sourire victorieux, je réponds : Faut avouer que ça valait le coup !

L'autre il se marre comme si c'était normal. Il se fout littéralement de ma tronche. Quel abruti. J'ai pas frappé assez fort, faut croire, vu qu'il ricane comme un con. La prochaine fois c'est pas sa tête que j'vise, et on verra s'il rit toujours autant. Surtout que bon. Faut qu'il se taise sinon les autres vont nous repérer. Et le but d'un cache-cache c'est de se cacher, justement, et surtout de gagner, comme tous les jeux. On a de la chance, déjà, il fait noir. Manquerait plus qu'y ait de la lumière, on serait pas dans la merde.

- Tais-toi Howard, j'compte pas me faire repérer, moi.

J'observe son visage sous toutes les coutures, et j'aperçois là où j'ai dû le frapper. Oh ben merde. J'vois pas clair mais j'crois que j'l'ai marqué. J'ai frappé si fort que ça, pour lui laisser une marque comme ça ? Je fronce légèrement les sourcils, et passe un doigt dessus. Ah non. Ah non, c'est pas moi, ça saigne pas. Il a dû se- Oooooh. Oh ben oui ! Il s'est battu avec l'autre, là, la tache de sa maison. J'me souviens pas trop de son nom, à lui. Mais apparemment ça s'est fighté comme il faut. Mais j'pense qu'l'ai quand même cogné ici. Oups. T'façon j'ai pas à culpabiliser, il n'avait pas qu'à me surprendre comme ça. J'le répète, je sais, mais j'pense que c'est parce que j'essaie de me persuader en fait mh. Alors que je l'observe, j'le sens qui en profite pour replacer une des mèches qui est venue se caser devant mes yeux. Je hausse un sourcil, et esquisse un faible sourire en coin. Je lâche Damon et recule d'un pas. Distance de sécurité. Ne changeons pas les bonnes habitudes.  "Faut avouer que ça valait le coup !" il me répond en continuant de sourire. Ahah, ouais, j'aurais dû frapper bien plus fort.

- La prochaine fois j'te jure que je te loupe VRAIMENT pas, Howard. J'aurais dû cogner plus fort. Ou viser ailleurs, je grogne. Bon toi tu veux peut-être rester là à contempler les étoiles mais c'est pas mon cas. J'compte bien me cacher.

Je jette un coup d'oeil circulaire, évitant de tourner le dos à l'autre taré. Pas envie d'être encore victime d'une de ses petites farces. Bon. Du coup je sais même pas d'où il est sorti, vu que j'l'ai pas vu. J'avance un peu, gardant un oeil sur Damon, mais j'ai toujours autant l'impression d'être paumée. Et j'vois juste rien de spécial pour me cacher. Muh. J'veux pas perdre. Je me tourne de nouveau vers le meilleur ami de la présidente Garnet.

- T'étais planqué où pour pas que je te vois ? Tu me dois bien ça, Damon, pour m'avoir fait frôler la crise cardiaque.

Nikki, en plus d'être violente - malgré elle ou pas -, est apparemment mauvaise joueuse. Elle m'ordonne en effet de faire moins de bruit pour qu'on se fasse pas repérer. Non mais ouais, elle a raison par contre, j'aime pas perdre non plus, donc faudrait que je parle moins fort. Il a encore trop bu le Howard, il se rend pas compte. Enfin il se rend bien compte de la douleur, malgré tout. Ouais, ça pique un peu. Beaucoup, même. Mais c'est pas grave, ça passera.

"La prochaine fois j'te jure que je te loupe VRAIMENT pas, Howard. J'aurais dû cogner plus fort. Ou viser ailleurs. Bon toi tu veux peut-être rester là à contempler les étoiles mais c'est pas mon cas. J'compte bien me cacher." Elle me fait marrer cette fille. Elle râle, mais j'suis sûr qu'elle m'aime bien, dans le fond. Je lui plais sûrement, ne serait-ce qu'un peu. C'est obligé. Le truc, c'est qu'elle a trop de fierté pour l'avouer. J'vais te faire oublier ta fierté moi à force Nikki, tu verras. C'est probablement pour cette foutue question de fierté, qu'elle se recule un peu après que j'ai viré une mèche de son visage. Pourtant il n'y avait aucun sous-entendu. Aucun, vraiment aucun. Pour toute réponse, je ris un peu plus. J'espère seulement qu'elle ne mettra pas ses menaces à exécution, je suis déjà suffisamment amoché comme ça depuis l'histoire avec le bouffon.

Petit silence. Je crois que Nikki regarde un peu aux alentours. Je crois. Je vois quasiment que dalle, en même temps. "T'étais planqué où pour pas que je te vois ? Tu me dois bien ça, Damon, pour m'avoir fait frôler la crise cardiaque." Ah bah j'avais raison, elle se remet dans le jeu, elle cherche une planque. Mais hors de question que je lui donne la mienne, non mais oh. Je veux bien être galant et tout, mais là c'est un jeu. Et on est quittes, en plus, vu la beigne qu'elle m'a foutue. T'as cru que j'allais te laisser ma planque aussi facilement ? Attends je veux bien partager mais c'est tout. J'pense qu'on y rentre facilement à deux, de toute manière. Je lui attrape la main, en tout bien tout honneur mh, afin de la conduire jusqu'au talus derrière lequel j'étais caché. Sinon c'est un coup à ce qu'on se perde, dans tout ce noir. C'est là, j'indique à la brune tout en m'y asseyant en tailleur. Je pense que, si on fait pas de bruit, y a large moyen qu'on gagne !

J'ai beau lui demander de se taire, monsieur Howard continue de rire à la première occasion. J'ai un escargot sur la tête ? Ou alors il a juste un peu trop bu. Ou alors il est juste un peu trop con. J'dirais un petit mélange des deux derniers. Parce que si j'avais un escargot sur la tête je l'aurais remarqué y a bien longtemps je pense. ... J'ai envie de passer une main sur le haut de mon crâne mais j'me retiens. J'vois pas d'où il serait tombé, ce brave escargot. Les escargots ne volent pas, et tombent encore moins du ciel. Heureusement. Bref. Ça me donne juste envie de le frapper pour le faire taire. Sauf que bon, je l'ai déjà bien poqué, et puis j'vais éviter de lui faire plus de mal et de le défigurer encore plus. Ce serait bête de le rendre moche tout de même. Même si c'est pas les mains qui démangent qui manque.

"T'as cru que j'allais te laisser ma planque aussi facilement ? Attends je veux bien partager mais c'est tout. J'pense qu'on y rentre facilement à deux, de toute manière." Ben tiens. Tant qu'à faire. L'autre il a pas compris le but du jeu ou quoi ? Enfin bon, j'suis quand même bien contente qu'il m'emmène avec lui, parce que j'ai quand même un peu la frousse moi maintenant à cause de cet abruti là. Non mais c'est pas possible. Damon attrape ma main et il m'entraîne jusqu'à sa cachette. J'ai toujours hyper peur à chaque fois qu'on me fait ce coup là. J'ai l'impression que je vais marcher sur quelque chose de pas cool, ou qu'on va me lâcher comme ça comme une paumée juste après que j'aie perdu tous mes repères. Du coup j'essaie de pas traîner.

"C'est là". Ok. Où, là ? Il s'est assis le con. Moi j'sais pas où j'suis, j'ai l'impression que j'y vois encore moins ici. Putain j'vous jure plus jamais je joue à cache-cache en pleine nuit dans une forêt. Ou alors je m'éloigne pas comme une pauvre conne. Je me penche en avant, pose ma main sur un truc dur. Ok c'est très certainement son genou. Ou alors y a quelqu'un d'autre avec nous. Bah l'horreur mais tais-toi Nikki. Je parviens finalement à m'asseoir, pas trop loin d'Howard. Plus on est proches moins il pourra faire de conneries, j'le sentirai venir. Enfin c'pas une raison pour lui grimper dessus non plus. Dis comme ça c'est étrange.

"Je pense que, si on fait pas de bruit, y a large moyen qu'on gagne !" Je ne peux m'empêcher de rire. Le mec il est drôle, vraiment. Depuis tout à l'heure il fait l'otarie, et il fait genre si on fait pas de bruit on va pas se faire repérer.

- C'que tu m'fais rire Howard. Depuis tout à l'heure tu ris comme une baleine, alors si ils sont pas sourds, j'suis presque sûre q- Je pousse un cri. Mon dieu. Y a un truc qui m'a frôlé le bras. Sans réfléchir je passe une main sur mon bras. Putain mais quelle erreur. Mais où est parti ton cerveau, ma pauvre Nikki.

Je sens huit pattes me galoper sur la main. J'ai une peur bleue des araignées. Et je sais pas comment je fais mais je réussis à ne pas hurler comme une dingue, je secoue ma main comme une pas bien et pour le coup j'crois qu'j'suis moitié grimpée sur Howard. J'ai jamais collé quelqu'un comme ça de ma vie je crois. En même temps on est rarement aussi scotché à quelqu'un qu'on côtoie pas tous les jours que quand on, enfin. Vous voyez quoi. Ouais j'suis pas une dépravée de Garnet, j'le dirai pas. Toujours est-il que bon. J'suis en mode koala accroché à sa branche d'eucalyptus là. En plus effrayée juste.

- Oh mon dieu, oh mon dieu, oh mon dieu. Y avait une, une sale bête sur ma main, je couine. C'est ignoble, c'est ignoble, mon dieu, quelle horreur muh. Je respire profondément histoire de me calmer. J'compte pas rester collée à Damon éternellement vous voyez. Sauf que là j'arrive pas à le lâcher. Quel abruti, c'est sa faute ça encore.

Une fois assis, j'attends que Nikki me rejoigne. Sauf que bon, dans le noir, c'est pas forcément très pratique de se repérer, et que j'ai dû lâcher sa main pour m'installer comme il se devait. Du coup, elle tâte un peu le terrain, elle a pas trop l'air de savoir où se poser, mais parvient finalement à trouver mon genou, et s'aide de ce repère pour ne pas s'assoir trop loin de moi. J'essaie de l'aider comme je peux mais bon, comme je viens de le dire, dans le noir, c'est pas forcément très pratique de se repérer.

Pourquoi est-ce qu'elle rigole quand je lui dis qu'on peut gagner si on reste discrets ? Je sais l'être quand je veux, enfin. Et quand il s'agit de jouer, enfin de gagner, à cache-cache, je peux être muet comme une tombe. La victoire vaut tous les sacrifices, même les plus insoutenables. Et dieu sait qu'il m'est insoutenable de fermer ma gueule parfois. "C'que tu m'fais rire Howard. Depuis tout à l'heure tu ris comme une baleine, alors si ils sont pas sourds, j'suis presque sûre q-" Et sa phrase s'arrête net. Pourquoi ? Parce qu'elle me prouve tout juste que je suis pas le plus bruyant de nous deux, en poussant un petit cri d'effroi. Ah putain, elle m'a fait sursauter. Il se passe quoi au juste ? Je la sens juste à côté qui agite les bras comme si elle essayait de repousser quelqu'un. Hein, quoi ? Y a quelqu'un ?

Sans réfléchir, et par pur réflexe de survie, je commence à imiter ma voisine, donc à agiter mes bras dans le vide, sans trop savoir à quoi ça me sert. Mais on ne sait jamais. Finalement, la brune me saute dessus et s'agrippe à moi comme si sa vie en dépendait. Tellement collée que je peux sentir son parfum, et c'est pas désagréable. C'est même plutôt rassurant ; au moins je sais que c'est bien elle qui a soudainement été prise d'une envie incontrôlable de me sauter dessus, et non un vieux moustachu puant la bière et au gros bide pas sexy. Du coup, je ne peux m'empêcher de sourire. Elle a enfin succombé, héhé.

"Oh mon dieu, oh mon dieu, oh mon dieu. Y avait une, une sale bête sur ma main. C'est ignoble, c'est ignoble, mon dieu, quelle horreur muh." Ah ben je comprends mieux maintenant. En fait, je lui sers tout juste de perchoir pour qu'elle évite de se retrouver à nouveau avec des bestioles plein le corps. Mais euh.. Elle est partie au moins, l'araignée ? Enfin j'en ai pas peur, hein. C'est juste que, bon, j'aime pas trop ça, quoi. Ça court vite, c'est moche et, qu'on se le dise, c'est pas l'animal de compagnie à qui je ferais des papouilles toute la journée. C'est même pas un animal de compagnie, déjà, de base. Enfin. Brr. J'en ai des frissons de dégout. Berk.

J'évite de laisser transparaitre mon dégout. De toute manière, faut bien qu'on fasse avec. Si ça se trouve, je suis assis sur un nid, ou y en a des dizaines qui vont débarquer petit à petit comme pour Harry et Ron dans la forêt interdite. Mais faut rester calme. Tant qu'il y a pas Aragog dans le lot, on se fera pas bouffer pour si peu. Et puis bon, ce serait gâcher l'instant que de se soucier de toutes ces bestioles, alors que j'ai enfin l'occasion de pouvoir tenir la belle Sloven dans mes bras. Ne lâchant pas mon sourire, j'approche mon visage de son oreille. Avoue, c'était une excuse pour me sauter dessus, je murmure délicatement avec ironie, avant d'embrasser légèrement le creux de sa mâchoire.

Mon Dieu, ce que je peux avoir horreur des araignées. De toutes ces bestioles, là, j'aime pas ça. C'est le genre de bêtes qui s'infiltrent par tout, qui galopent à la vitesse de la lumière, et qui piquent. Princesse Nikki. J'aime pas ça, j'aime pas m'asseoir par terre, j'aime pas traîner dans les bois, merde, mais qu'est-ce que j'fous là muh. Pourquoi j'étais partante pour ce truc, sérieux. Qu'est-ce que j'ai fait. Dois y avoir des araignées partout, partout, partout. Des bestioles qui se baladent tout autour de nous. Qui vont nous grimper dessus. Oh mon dieu. J'échappe un couinement, essayant de retrouver un rythme cardiaque normal. Zen, Nikki, zen.

Je sens alors le souffle chaud de Damon près de mon oreille, qui m'arrache un frisson. Allez pas croire qu'c'est le fait qu'il soit proche qui me fait cet effet, c'est juste que. Que voilà, c'est tout, j'frissonne parce qu'il m'a plus ou moins soufflé dans l'oreille. Mh. "Avoue, c'était une excuse pour me sauter dessus" il me murmure, avant que je ne sente ses lèvres sur ma joue. C'est pas désagréable, donc j'vais pas dire que ça l'est. Mais. Bon. Je me mords la lèvre, penchant la tête sur le côté. On peut dire qu'ça a au moins le don de me détendre un peu plus.

- Ah, trop perspicace, Howard. Va pas croire qu'j'l'ai fait exprès, tu aurais été un caillou, j'aurais fait la même chose.

Je hausse les épaules, rentrant l'une de mes mains dans ma poche de gilet, l'index de l'autre étant occupé à glisser du haut du nez du brun jusqu'à son menton, s'attardant certainement un peu trop longtemps quand il atteint sa bouche, mh. Je souris puis repousse son visage avant de descendre de ses genoux. Parce que bon. Faut pas abuser non plus, il a profité de ma soudaine frayeur, et faudrait peut-être pas changer les bonnes habitudes. J'suis Nikki, je reste pas accrochée aux gens durant deux heures, même si j'ai une peur panique des araignées. C'est mieux pour eux comme pour moi, si vous voulez mon avis. Chacun reste de son côté, et comme ça y a aucun souci. J'suis pas du style à faire ami-ami, déjà. J'ai juste peut-être bu un verre de trop, et j'suis pas toujours très lucide du coup. Mais là, il semblerait que quelque chose se soit allumé là-haut, et qu'ça m'ait rappelé les bases.

Je croise les bras, tapant du pied histoire d'oublier qu'y a sûrement un tas de bestioles tout autour. Comme ça, en plus, ça les éloigne. J'crois que je regrette de plus être sur mon perchoir pour le coup. Mais bon, tant pis, ce sont les règles. Puis, je me redresse, croyant avoir entendu un bruit. C'est quoi ça ? Mon imagination ? J'sais pas. Bon aller, tais-toi Nikki, faut que tu la fermes, si tu veux gagner. Et tu veux gagner. Alors on la met en veilleuse, et t'essaies de penser à autre chose qu'aux bêtes à tes pieds. Mais bon. J'ai besoin de savoir si j'hallucine.

- T'as entendu ? Je demande tout bas à l'abruti assis à côté de moi.

"Ah, trop perspicace, Howard. Va pas croire qu'j'l'ai fait exprès, tu aurais été un caillou, j'aurais fait la même chose." Je me mets à rire doucement. Ah bon ? J'y crois pas trop. La bise que je viens de lui offrir a pas plus eu l'air de la déranger que ça, si vous voulez mon avis. Elle aurait très bien pu me baffer, me dire que j'suis "qu'un con, Howard," et qu'elle m'aimerait jamais, et pourtant, rien de tout ça. Non non, elle tire même pas la tronche, c'est dire. Au contraire, elle s'amuse à m'effleurer le visage avec son index. Qui ferait ça à un caillou ? Je me le demande. Elle ralentit le chemin de son doigt au niveau de mes lèvres, ce qui me fait sourire de plus belle, relativement satisfait. Pourquoi j'ai autant de mal à te croire ?, je lâche alors qu'elle repousse mon visage et descend de son perchoir - c'est à dire, mes genoux. Une fois de plus, je rigole. Hilarante malgré elle, la Nikki.

Hilarante, et surtout pas très rassurée dans le noir, au beau milieu de nulle part, avec un semi-gay qu'elle prend pour un psychopathe. Elle se relève alors qu'une sorte de craquement se fait entendre. Je tourne subitement la tête vers ce que je crois être le lieu de provenance du fameux craquement, à l'affût. On sait jamais ce que ça peut être. "T'as entendu ?" Je me lève à mon tour, discrètement et sans faire trop de bruit, et regarde autour de moi. Pas trop rassuré non plus, en fin de compte. Mais bon, ma fierté masculine me force à ne rien laisser transparaitre. Je respire donc un grand coup et me concentre sur ce qui m'entoure. Pas facile avec autant d'alcool dans le sang, mais on peut le faire.

C'est alors que j'aperçois, au loin, une faible lumière se promener. Elle s'intensifie petit à petit. Quelques bruits de craquements de branches au sol accompagnent la lumière. Quelqu'un s'approche. Putain, c'est qui ? Cache-toi, je chuchote à Nikki en lui attrapant le poignet afin de l'inciter à retrouver notre cachette initiale. J'attends quelques secondes, sans bouger, en évitant un maximum de faire du bruit. C'est limite si je me retiens pas de respirer.

La lumière s'approche, encore et encore. Les bruits de pas s'intensifient toujours plus. La personne n'est pas seule. J'en viendrais presque à craindre une horde de bûcherons violents, prêts à se battre parce qu'on se serait approchés de trop près de leur terrain. C'est ouf, je suis pas rassuré. Mais finalement, toutes mes craintes s'effacent au moment où une nouvelle voix s'élève.

"Vous pouvez sortir de là vous deux, on vous a repéré !" crie James, visiblement accompagné par quelques perdants. Je soupire, entre soulagement et déception. Soulagement, parce que ce ne sont pas des bûcherons, et déception parce qu'on s'est fait cramer. Je lance une moue à Nikki, qui doit un peu mieux me voir grâce aux lampes de poches, et me rends. J'espère au moins qu'on a gagné, vu le temps qu'on y a passé.

"Pourquoi j'ai autant de mal à te croire ?" Parce que t'es trop con ? Non, j'sais pas. En fait j'ai pas vraiment réponse à ça. En même temps, si j'avais gardé mon doigt pour moi, ça aurait été bien plus simple, on est d'accord. Mais apparemment y a deux fils qui se sont touchés là-haut, et j'ai fait une connerie. Tant pis pour moi, tant mieux pour lui. J'pourrais très bien lui sortir que je suis lesbienne, mais quatre chances sur trois qu'il y croie pas, donc ça risque d'être chaud. Est-ce que les gays ont un radar à gays ? Quelle interrogation profonde, Nikki. Non mais en vrai, pour être sûr de pas se prendre de râteau, vaut mieux être certain que la personne en face de soi est du même bord que nous, non ? Pourquoi je pense à ça alors qu'j'suis au milieu des bois avec un caillou vivant plus ou moins attirant ? Faut que j'arrête de réfléchir, sincèrement.

- Peut-être parce que c'est pas tout à fait la vérité ? Je déraille encore.

J'crois que l'autre caillou à mes côtés n'est pas franchement plus rassuré que moi. Mais bon, j'vais éviter de lui dire, c'est pas cool, il perdrait en crédibilité. Et j'vais essayer d'oublier moi aussi sinon j'me foutrai de sa gueule éternellement, déjà que c'est bien parti. M'enfin sa tronche de bg négligé rattrape le tout. Mais ça lui dîtes pas, il sourirait à nouveau comme un con. Et moi je flippe un peu plus, à chaque branche qui craque, à chaque petit bruit. C'est horrible putain. Plus jamais de ma vie je fais ça. Mais remarquez, j'étais plutôt confiante, avant que l'autre abruti ne me surprenne, là, avec ses répliques de terroristes. C'est sa faute, encore. "Cache-toi" me chuchote Damon en attrapant mon poignet, histoire qu'on se planque à nouveau comme il faut. J'espère qu'c'est pas des gros tarés échappés d'asile, apparemment y en a dans le coin. Sinon c'est mort j'me casse, et tant pis pour le caillou. ... Ouais, non, je l’emmènerais peut-être avec moi, j'suis pas sadique à ce point là, quand même. Et plus je flippe plus je me dis que plus jamais je m'aventure dans les bois tard le soir. J'le jure.

"Vous pouvez sortir de là vous deux, on vous a repéré !" J'hésite entre expirer, ou éclater en sanglots. J'aime pas perdre, putain. Je grogne, déçue. Damon fait la moue, visiblement pas super heureux non plus de s'être fait choper. Woh, au moins un point commun, ça relève du miracle. On est sur la bonne voie, on va finir par s'entendre, je vais finir par le supporter. Ou pas. Je me relève, retirant les saloperies qu'auraient pu s'accrocher à mes vêtements.

- C'ta faute ça, à force de rire comme un débile à chaque truc que je fais. Sérieux, j'pourrais croire que tu te fous continuellement de ma gueule. J'te jure, si on a perdu, Howard, j'te, je ne finis pas ma phrase, soupirant. J'sais même pas c'que j'lui fais.

"Peut-être parce que c'est pas tout à fait la vérité ?" Oh oh oh oh oh, vous avez tous entendu ça ? Vous êtes témoins ? Y a de l'évolution par ici. Enfin Miss Sloven l'inatteignable se laisse amadouer. Eh ben, on avance petit à petit, hein Nikki ? Je ne réponds pas, et me contente simplement de sourire fièrement. C'est pas tous les jours qu'on arrive à une évolution avec une porte de prison. Eh ben, ça aura fait ma soirée, ça.

Mais bon, le fait qu'on ait finalement été trouvés, ça va probablement niquer toute l'amélioration de ma relation avec la belle. Parce qu'apparemment, elle n'est pas très bonne joueuse, c'est peu de le dire. Merci d'avoir foutu mon coup en l'air les mecs, j'apprécie. Rha ça fait chier. J'en viendrais presque à être aussi ronchon que Nikki, tiens. Sauf que non, elle me fait bien trop rire pour que j'arrive à râler, huhu. Je la regarde, sourire niais aux lèvres, en l'écoutant déblatérer son discours de mauvaise joueuse. "C'ta faute ça, à force de rire comme un débile à chaque truc que je fais. Sérieux, j'pourrais croire que tu te fous continuellement de ma gueule. J'te jure, si on a perdu, Howard, j'te" Sa phrase s'arrête comme ça. Tant mieux au final, parce que je crois que j'ai même pas envie de savoir ce qu'elle me fait.. Quoique, héhé.

Mais t'inquiète, j'suis sûr qu'on a gagné de toute manière. Hein on a gagné, James ?, je me retourne vers l'hôte, attendant sa réponse. "Ouais ouais, vous avez gagné, ça fait un quart d'heure qu'on vous cherche." Je me tourne à nouveau vers Nikki, sourire victorieux. Tu vois, on a gagné. Tu comptes me faire quoi, du coup ?, je lui demande en riant subtilement, avant d'enchainer à l'attention de tout le groupe, sans vraiment attendre de réponse de la part de Sloven : Bon on rentre ? On commence à se les peler ici.