Ça y est ! C'est les vacances de Noël. Des jours de repos tant attendus. Il s'est passé tellement de choses ces dernières semaines. On a perdu 3 étudiants si rapidement... Je ne les connaissais pas personnellement mais ça me touche quand même. Les gens en parlent, je m'y intéresse. Dur de prendre conscience qu'une vie est si vite arrachée ou perdue. En ce vendredi soir, rien de tel que d'aller m'évader quelques heures dans cette boîte de nuit dont la majorité des étudiants d'Enamor parlent. Poussée par la curiosité de la découvrir et le besoin de m'euphoriser un peu, j'invite une copine pour qu'on s'accompagne mutuellement.

Ce soir, je sors en total look noir. Top légèrement décolleté. Perfecto en cuir. Jean slim. Derbies vernis. Une tenue suffisamment décontractée, féminine, sans pour autant attirer les regards pervers. J'attache mes cheveux en queue de cheval assez haute pour dégager ma nuque. Et je file à la rencontre de ma pote. Et nous voilà sur le chemin de la piste de danse.  

Je commande un verre au comptoir et je scrute la salle qui fourmille de plus en plus. Des têtes me sont familières. Et sans m'en rendre compte, j'enfile mon premier verre assez rapidement. J'en commande un second et rejoint mon accompagnatrice, le sourire aux lèvres, la chaleur qui commence à m'enivrer les veines. Je sens mes joues rosir. Et petit à petit, je la suis sur le rythme de la musique,  mon alcool à la main. Je me laisse guider dans la foule. Ma copine s'éloigne et ne tarde pas à se trouver un partenaire aussi sexy qu'elle, pour le coup. C'est pas le but de ma soirée. Je veux juste picoler. M'oublier. Danser. Encore une gorgée et mon verre est vide. Il me reste de quoi me commander un troisième et dernier cocktail. J'essaie d'écarter le monde mais le parcours pour atteindre la boisson est si difficile. Mes jambes s’alourdissent. Et la pénibilité de ma marche me fait rire. Tellement rire. Les gens qui dansent me retiennent avec leur dos, leurs épaules, leurs bras, et j'en vois enfin le bout.

Chancelante, je m'accoude sur le bois du bar en ricanant. J'ignore où est ma pote et je m'en fous. Je parviens à capter le regard du serveur en lui faisant les yeux doux. Il se marre et me tend la main, réclamant la monnaie. Mes doigts se perdent dans ma poche de jean et ne trouvent aucune pièce. Merde. Dans ma course folle, j'ai du égarer le peu d'argent qu'il me restait. Mais on n'est qu'à la moitié de la nuit. Et putain, j'ai encore soif. C'est mort. La soirée ne peut pas se terminer comme ça. J'insiste auprès du jeune homme mais il me fait signe d'un air désolé qu'il ne peut pas enfreindre son règlement. L'expression de mon visage devient boudeuse en une fraction de seconde. Frustrée, je soupire comme une gamine capricieuse. Mes yeux tentent de reconnaître la petite tête de ma copine mais toutes ces lumières, ces gens qui se défoulent sur la piste, me font tourner la tête et je préfère m'attarder sur le verre à moitié plein de la blonde qui me tourne le dos. J'ai l'impression qu'il m'appelle, comme si une aura lumineuse me l'offrait généreusement. Cette jeune fille à la chevelure dorée ne semble pas me prêter attention. Je la surveille quelques minutes, mine de rien. Et me rapproche discrètement, dangereusement, de ce présent qui va me désaltérer !

Je passe une jambe par dessus le siège haut, dernier obstacle avant d'atteindre ce liquide qui m'obsède. Je jette un œil à gauche, à droite. L'étudiante s'exclame en regardant au loin. Ni une ni deux, ma main choppe son verre et le guide à mes lèvres. Je me précipite à le descendre d'une traite, en équilibre sur le tabouret, mais ma gorge anesthésiée ne conduit pas l'alcool dans le bon tuyau et je m'étouffe en entraînant le siège dans ma chute. Mais tout se passe au ralenti. Je prends soin de tenir le verre en l'air pour le protéger. Et je m'étale comme une grosse merde.

Triomphante, je regarde le verre, vide, sain et sauf et le brandit en criant enthousiasment que je lui ai sauvé la vie ! Je rigole, allongée sur le dos au milieu de ces pieds qui m'évitent. Et je ne me soucie de rien.

-Oh alleeeeeez viens avec moi!!!!
Ma coloc me tane pour que je vienne en boîte avec elle. Ce n'est pas ce que je préfère... Alors oui avoir les regards tous braqués sur moi lorsque je fais des figures souples à la barre ne me déplaisent pas mais dès que je descends du socle avoir toutes les mains posées sur mon fessier ça déjà c'est très dérangeant. Et toutes les invitations à coucher, les drogues qui peuvent être contenues dans un verre qui à première vue semble innoçent, les gens qui se poussent et la musique qui vous détruit les oreilles, etc. Bref, tout ceci fait que c'est tout bonnement insupportable.q s  Malgré tout j'accepte. Je me maquille et mets des escarpins noir accompagné d'un jean moulant noir troué exprès. J'agrémente le tout avec une veste en cuir noir et un débardeur crop-top moulant gris. Une fois sortie de la salle de bain je me regarde dans le miroir; j'ai l'air d'une femme fatale. Surtout avec mon rouge à lèvre rouge que viens de me rajouter ma coloc tout en me répétant que je suis "so sexy".

Nous marchons donc vers la boîte de nuit, arrivée devant ses amis sont là. Ce sont tous des gens de l'université, obsidian, opal et moonstone se mélangent. Tous ont l'air sympa mais à vrai dire mais je ne me prête pas du tout au jeu qu'est la boîte de nuit. Nous n'étions même pas arrivée que l'on s'est faîte abordée. Une fois dans la boîte j'essaye de me mettre dans l'ambiance. Mais je n'y arrive pas, très rapidement tout m'agace. Un ami un peu lourd de ma coloc essaye depuis tout à l'heure de me faire du charme mais je suis tellement agacée que je ne veux rien.
C'est mort, il faut que je boive ou je n'y arriverais jamais. Je m'écarte rapidement du jeune homme, sa mine parait déçue mais une fois au bar je remarque qu'il s'est déjà trouvé une nouvelle target. Je commande un verre que je bois cul sec. Je me sens déjà boostée. Aussitôt j'en reprends un deuxième. Je m'apprête à l'avaler d'une traite mais une fille brune me le prend des mains. Je reste sidérée lorsqu'elle le boit. Mes yeux restent grands ouverts, je ne m'attendais absolument à ça... Elle se ramasse. Mon bon côté lui dit d'aller l'aider à se relever et mon mauvais lui dit de lui foutre une baffe et de la repousser par terre aussitôt après. Elle m'a pris mon verre l'autre conne!

Ma coloc arrive et vois mon regard haineux face à cette piteuse fille qui, triomphante brandit MON verre et me sors qu'elle l'a sauvée. Elle se fiche littéralement de moi et est complétement bourée.
"Olivia? Ça va?"
Ma coloc passe sa main sur mon épaule.
Non ça va pas elle m'a gâchée mon verre!
Allez, calme toi Olivia. N'oublie pas: bien se comporter quelque que soit la situation. Je la relève et lui prend le haut du bras d'une main et l'entraîne hors de la boîte. Arrivée dehors je lui lance un regard méprisant et contrarié.

-Je te reconnais, tu es d'Enamor. Je peux savoir ce qui t'as pris? C'était mon verre et je n'ai pas pour habitude d'offrir des pots à des inconnus.

Mon ton est sec. Je n'ai jamais rencontré de garnet mais à mon avis s'en est une. Comportement égoïste, elle fait ce qu'elle veut, toujours bourré. Hum oui, typique d'une garnet d'après ce que j'ai entendu dire.

Je tente de reprendre mon souffle après cet étranglement quand je sens mon corps attiré vers le haut. Ni une ni deux je me retrouve sur pieds et ce mouvement me donne légèrement la nausée. Pour le coup, je sens mon cœur battre à cent à l'heure. Mon corps est maintenant projeté en direction de la sortie sans que je ne comprenne quoi que ce soit. Je suis la blonde malgré moi jusqu'à ce qu'elle se plante devant moi, furieuse et m'engueule comme du poisson pourri.

J'ai envie de ricaner tant elle semble ridicule. S'emballer à ce point pour un malheureux petit verre. Bon ok, à sa place, j'aurais peut être réagi pareil. Ou pas. J'en sais rien. Là, je suis alcoolisée. Mais j'avoue que sa soufflante me ramène un peu les pieds sur terre. Et je chercher désespérément en moi un peu de lucidité pour lui répondre.

« Mais tu sais, tout le monde ou presque est d'Enamor ici. »

Mon ton est quelque peu arrogant. Je ne me reconnais absolument pas. J'ai vraiment abusé de la boisson. Je tente de m'expliquer aussi clairement que possible. Comme si je parlais à une gamine de 4 ans.

« C'est aussi simple que ça. J'ai perdu mes sous. Et j'avais soif. Ton verre était là. Je l'ai bu. »

Genre normal. C'est aussi évident que ça. Je m'exprime en mimant la situation. Moi aussi j'ai l'air d'une débile, mais c'est bien le cadet de mes soucis. Soudainement, une sueur froide me parcoure l'échine. J'ai tout juste le temps de lui tourner le dos pour régurgiter les trois verres que je m'étais enfilés. Je mets fin à cette petite scène d'humiliation avec un haut-le-cœur. Je recherche dans ma poche arrière de jean un mouchoir ou un truc pour m'essuyer la bouche avant de reprendre notre discussion. Et j'en sors un billet. Putain, quelle conne. Je n'avais pas fouillé la bonne tout à l'heure.

Les restes de mon alcoolémie me font rire, je trouve cette situation si hilarante, alors qu'elle n'a pas lieu d'être. Tant pis, je tire ma manche et me sèche les lèvres. Je reprends doucement mes esprits, avec une barre qui s'empare lentement mais sûrement de mon front, et refait face à l'étudiante. Il est bien trop tard pour m'excuser. Et c'est avec un sourire en coin et les yeux explosés que je lui tends généreusement mon argent.

« On passe l'éponge ? »

J'ai toujours pensée que discuter avec une personnage totalement ivre n'état pas une chose très utile. Ce dernier peut avoir différentes réactions telles que la violence, vomir ou ne pas vous écouter. Je ne supporte pas que l'on ne m'écoute pas. Et cette jeune fille faisait exactement ce que je détestais. Je gardais mon sang-froid et décida de tourner la situation à mon avantage. Faire semblant d'être compréhensive, en d'autres termes la manipuler.

« Mais tu sais, tout le monde ou presque est d'Enamor ici. »

Je me fis automatiquement plus douce.
-J'ai remarqué oui, mais je suis nouvelle donc je n'en savais trop rien.

« C'est aussi simple que ça. J'ai perdu mes sous. Et j'avais soif. Ton verre était là. Je l'ai bu. »

J'arque un sourcil tant son explication est peu suffisante. Je pousse un soupir agacé et je ne prends pas la peine de relever sa remarque.

« On passe l'éponge ? »

-o.k

Mon cerveau dit non et l'insulte de tout les noms mais mes lèvres lui sourissent et disent oui.
Je n'ai pas envie de la frapper, comme elle l'a dit beaucoup de monde ici vient d'Enamor et ma réputation s'en trouvera salie et avec ça ce sera direct sur le tableau de S. Autant la jouer stratégique et faire la toute gentille devant elle. Je reprends le plus calmement du monde l'argent et le met dans ma poche.

-Tu es une Garnet?

Une Garnet ? Moi ? Est-elle sérieuse ou se joue-t-elle de moi ? Je la regarde, ébahie, alors que mes lèvres dessinent petit à petit un sourire sur mon visage.

« Tu penses réellement que je t'aurais remboursé... si j'étais de cette maison ? »

J'y crois pas. Je dois vraiment être dans un état misérable pour qu'on oublie de me considérer telle que je suis. Les gens m'apprécient généralement. Je ne me prends pas la tête et je ne fais pas chier mon monde. Sauf quand j'ai trop bu, visiblement. J'ai cessé de parler fort, mais ma voix reste légèrement cassée cependant, rendant certaines syllabes inaudibles.

« Tu es suffisamment intelligente pour comprendre que... je ne suis pas dans... mon état normal. »

Je peine à poser mes mots. A réfléchir. Je vis vraiment mal le fait d'être insultée de ce nom. J'ignore si c'est l'effet enivrant de la boisson mais mes émotions semblent démesurées, et passent du coq à l'âne. Ma main rejoint mon front machinalement. Mon corps vacille légèrement en arrière, jusqu'à ce qu'il se laisse glisser le long du mur et que mes fessent atterrissent sur le sol gelé. Un problème de moins à gérer. Maintenant que je suis stabilisée, mon ventre se met à gargouiller. J'ai faim, et j'ai la nausée. Putain, tout se confond. C'est chiant.

« Opal. Je suis... Opal. »

Maintenant, j'ai presque honte de lui annoncer à quelle maison j'appartiens, je ne lui fais pas du tout honneur. Puis merde faut bien lâcher prise aussi de temps en temps. Toujours bien faire les choses. Suivre un rythme régulier. S'enfermer dans une routine. On est jeunes, majeures et vaccinées, faut profiter des bonnes choses de la vie. Enfin bonne... tout est relatif.

« Et toi ? Qui est la personne que j'ai pu rendre si... hargneuse ? »

« Tu penses réellement que je t'aurais remboursé... si j'étais de cette maison ? »

La question me surprit, à vrai dire tout dans son attitude me faisait penser à une Garnet mais apparemment ce n'en était pas une vue que lorsque j'avais émis le fait qu'elle appartenait aux rouges elle avait parue l'air très contrarié.

-Eh bien, je n'en sais rien... Je n'en ai jamais rencontré.

Sauf ma rencontre avec Len hier mais je préférais garder tout ceci secret. Autant que S. ne soit pas au courant et ne pas ébruiter que la princesse d'Angleterre se la coule douce à Enamor. Cela mettrait aussi mon secret en danger, ce que j'espère n'arrivera jamais. Malgré tout, elle venait de tilter que son comportement hautain était tout aussi digne d'une rouge et elle se stoppa dans son attitude pathétique.

« Tu es suffisamment intelligente pour comprendre que... je ne suis pas dans... mon état normal. »

-Certes, mais je ne connais pas non plus ton état normal car je ne sais pas qui tu es.

Une simple question de logique qu'elle ne semblait pas comprendre.

« Opal. Je suis... Opal. »
Je souris et compris à présent en quoi elle avait été aussi outrée. Les opal n'avaient-ils pas une réputation sages et disciplinés? Bah... Faut croire qu'ils ont envie de s'amuser. Je les voyait plus comme des étudiants cloués à la bibliothèque et parlant discrètement mais moi et mes 2000 clichés venaient de tomber à l'eau. Ils étaient des étudiants tout à fait normaux.

« Et toi ? Qui est la personne que j'ai pu rendre si... hargneuse ? »
Elle me fit à nouveau sourire et je me détendit.

-Moi c'est Olivia, je suis une moonstone.

Dans un petit rire je ne put m'empêcher de lui faire une réflexion gentille.
-C'est drôle je n'avais pas cette image des Opal!

Mon interlocutrice a énormément de répondant et marque des points. Elle a tout bon. Je me permets de lui faire des remarques, de la remettre à sa place, alors que c'est bien moi qui ais besoin de redescendre d'un étage. L'alcool m'a fait monter haut. Très haut. Heureusement que j'ai croisé son chemin, elle sait tirer sur la ficelle. Olivia, donc.

C'est drôle je n'avais pas cette image des Opal!

« Moi non plus … ! » 

Mais elle a tellement raison ! Sa phrase est si véridique que je ne peux m’empêcher de rire. Je suis lamentable.

« Enchantée. Moi c'est Lindsey. »

Je me calme et me mets à jouer avec mes doigts quelques secondes. Je les observe attentivement s'entremêler. Et je réfléchis. Difficilement. Mais je parviens à organiser un peu mes pensées et à sortir un phrase correcte.

« Moonstone... La sagesse incarnée... Et comment vous décompressez, chez les Blancs ? »

Une question à laquelle je portais un réel intérêt. En aucun cas mon ton n'était ironique, cynique, ou sous entendu de vices cachés. Je la regardais, sincèrement, avec une expression étonnée même. Je trouve que sa réaction a était quelque peu démesurée. Mais je comprends mieux depuis que je connais sa maison. J'aurais du m'en douter, vu son air ingénu, sa outrance envers mon comportement... Cette étudiante semble devenir mon billet de retour vers le monde réel alors... J'ai envie de l'écouter. Sa voix me canalise.