Le métro à sept heures du mat, c'est la joie ||

Bon bon bon, une fois de plus j'ai probablement trop bu. C'est pas un crime, on est jeunes faut profiter, tout ça. Mais bon. Là du coup, j'ai clairement envie de rentrer à l'université, et dormir comme un porc jusqu'à pas d'heure. Le gars chez qui se passait la soirée avait pas de place dans son pauvre studio, pour y faire dormir tout le monde. Du coup, il en a viré la moitié. Dont moi. En même temps, j'ai pas de boobs, je me maquille pas, j'ai pas de longs cheveux blonds, et j'ai de la barbe. Comprenez donc que j'avais pas les caractéristiques suffisantes pour gagner ma place chez lui.

Et évidemment, vu que je savais d'avance que j'allais finir complètement caisse, j'ai pas pris ma voiture pour y aller, donc j'ai pas de voiture pour rentrer non plus, logique. En même temps, c'est peut-être préférable; même si je suppose avoir bien dessoûlé depuis, je tiens pas à me faire contrôler avec une alcoolémie aussi haute, étonnamment j'ai pas franchement envie de perdre mon permis, mh. Du coup, j'ai pris le métro. Par chance, à cette heure-ci y a pas grand monde. Juste les plus motivés à bosser, qui se sont levés aux aurores pour se retrouver dans les transports en commun dès sept heures du matin et ce, un samedi. Ouais, y en a qui sont motivés en effet. Eux ils vont bosser, moi je vais me coucher, chacun son truc.

Je parviens à me trouver une place libre dans le fond du wagon, c'est l'idéal. Le métro redémarre, tandis que je pose mon crâne tant bien que mal contre la vitre. C'est pas le top, mais j'ai la tête bien trop lourde pour la tenir droite pour l'instant. Au pire je suis à l'UE dans un quart d'heure, ça devrait aller.

Putain, on a carrément abusé à cette soirée.
Il est déjà 6h52 du matin, le soleil commence à se lever, et je suis complètement déchirée. Mais d'une puissance, c'est incalculable. Et je me retrouve dans l'océan de merde, bien vaseux. Liana, la fille organisatrice de la soirée chez elle, ne peut pas faire dormir ses adorables invités chez elle. Ses parents rentrent à 8h du matin, et elle serait cramée. Pas de bagnole, de lieu où dormir tout près, qu'est-ce qui me reste ? Espérer choper un métro pas trop tard.
Bon, bon, bon, j'me grouille. Je galère à m'habiller correctement, à replisser ma robe, à essayer de brosser convenablement mes cheveux et à savoir prendre toutes mes affaires. Enfin, j'salue Liana, mais pas très agréablement. A vrai dire je suis au bout de ma vie, défoncée, autant qu'en fatigue qu'en alcool, et j'suis virée de sa baraque de bourge. Sérieux, elle savait pas anticiper les choses ? J'suis deg.

Je sors de sa propriété. Putain ce solei, limite je suis sûre j'éblouis et brille comme Edward Cullen. Limite, j'ai jamais vu de soleil de ma vie. Je plisse douloureusement les yeux, sûrement je ressemble à un chameau malade, ma tête doit être affreuse. J'enfile mes lunettes de soleil, ça fera l'affaire. J'cours presque à une station métro, j'y arrive et observe les horaires. Le cul, le cul ! Dans 2 minutes y'en a un.

Alors, j'attend. Je peine à tenir debout, mais le bruit sourd qui vient du fond du tunnel m'éveille. Yes. Le métro est là, j'y monte. Pas trop bondé, mais la seule place pas trop loin est à côté d'un mec. Putian, c'est pas l'allemand barbu, là? Ah bah. Ouais, Felicis le kiffe. Bon. Je vais m'asseoir à côté. Ca me casse les ovaires, je pourrai pas m'étendre pour dodoter. Ah bah, apparemment, si. J'suis déjà dans les bras de morphée, et ce, étalée sur le divin Barbu.

J'étais tranquillement en train de m'assoupir, là, confortablement - ou pas - installé sur mon siège, genre à une trentaine de secondes près je ronflais, quand on vient me déranger dans mon sommeil. Y a une fille là, qui vient de se poser à côté de moi. Je m'en fiche, au début. Y a plus énormément de places en fin de compte et, vu l'odeur de liche qu'elle dégage, je pense qu'elle est au moins aussi caisse que moi, et que donc il vaut mieux en effet qu'elle se pose n'importe où. Tant pis si c'est à côté de moi, tant qu'elle me fait pas chier pendant que je dors.

Sauf que si. C'est là le problème. La meuf s'étale sur mon épaule, sans se poser de questions. J'en bouffe presque ses cheveux. Je manque d'en avaler quelques uns, ce qui me fait sursauter et réaliser que, oui, en effet, y a bien une jeune femme écrasée sur moi. Je lève la tête pour me dégager de sa masse capillaire, recrache les quelques poils récalcitrant ayant élu domicile sur ma langue, et secoue vigoureusement mon épaule pour la réveiller. J'te dérange pas j'espère ?, je grommelle. Je suis pas un oreiller, un peu de respect. Déjà que le métro c'est pas l'endroit le plus confortable pour une sieste, alors si en plus je dois me coltiner une ivrogne tout aussi ivre que moi, voire plus, pendant tout le trajet, ça va pas trop le faire.

Alors que j'suis bien, tranquille, que je dors comme un bébé, bercée par les virages pourtant brusques du métro, je sens une pression sous ma tête. Y'a un truc qui me dérange, c'est dur, ça bouge et j'ai l'impression que j'suis quelque part où tout est instable. Je commence à faiblement ouvrir mes yeux, mais je les referme, émettant un bruit d'inconfot et un long soupire. Je me remets convenablement et essaie de me rendormir, quand..

J'te dérange pas j'espère ? quelqu'un me dit. C'est comme si il était proche.

Ah bah oui. J'ouvre complètement les yeux et me relève, encore sonnée. Je le regarde, comme si je comprenais rien à la vie. Mais d'où ce qu'il sort, lui ? C'est quand la dernière fois qu'il s'est rasé la barbe ? Tout aussi indigne que Felicis. Je grimace, énervée et surtout agacée. J'ai juste envie qu'on me foute la paix. Et surtout, voir un Opal ou un Moonstone aurait été la dernière chose que j'aurai voulu croisé. J'arque un sourcil face à Ezra, mettant en doute son comportement inconvenable face à moi.

Tu pourrai la fermer, Ezra, tu fouettes l'Opal. Je soupire désespérément et pose maintenant ma tête contre la vitre.

Tiens donc, l'ivrogne connait mon prénom. Attends, d'où on se connait ? Alors qu'elle arque un sourcil d'un air aussi dégouté que si elle venait de marcher dans sa gerbe, je profite d'avoir enfin son visage bien en face de moi pour l'observer. Ouais, elle me dit quelque chose. Elle était à la soirée et je m'en rappelle pas ? Mh, peu probable. J'ai bien bu, mais je suis quand même capable de me rappeler de ce que j'ai fait et de qui j'ai vu dans la soirée. Enfin je crois.

Mais c'est alors qu'elle ajoute que je "fouette l'Opal" comme elle le dit si bien, que c'est l'illumination dans ma tête. Mais ouais, je l'avais complètement zappée elle, c'est une meuf de l'UE aussi, Esfir je crois, un truc du genre. Si je me souviens bien, c'est une sacrément belle trainée, une Garnet pas des plus appréciables. C'est dommage, elle est pas moche en soit. C'est juste con qu'elle se dégueulasse de vulgarité, mh. Un peu de sensibilité ne lui ferait pas de mal, au moins ça éviterait qu'elle ressemble à une camionneuse en rut.

"Tu pourrais la fermer, Ezra, tu fouettes l'Opal," donc. Moui, c'est amical. Enfin pas trop hein, on est d'accord. Et je suis pas d'humeur à faire copain-copain, donc bon. Mouais, et toi tu pues le foutre, chacun son truc du coup, je réponds sans trop réfléchir, sur un ton plutôt neutre. Au moins elle a arrêté de se coller à mon épaule, c'est déjà ça.

Mouais, et toi tu pues le foutre, chacun son truc du coup, Ouais ça c'était le truc spontané et con du jour. Je me retourne vers lui et roule mes yeux, puis laisse mon incompréhension en suspens. Il a pas mieux dans sa playlist, lui ? Je soupire et secoue la tête, aucune répartie ces créatures de naïveté. Je fini par pouffer de rire, parce que oui, c'est marrant. Marrant de voir la connerie de certaines personnes. Alors ça, ça restera dans les anals comme répartie. je soupire doucement, puis reprends en rigolant et faisant des guillemets avec mes mains, Tu pues le foutre! je ris encore plus, me foutant bien de sa gueule et cesse, laissant un soupire d'épuisement de joie. Génial, j'adore. Je reprends une expression de peste, regardant maintenant le tunnel noir du métro. Elle va bien ta gonz, Felicis ? Ou Ava, je sais pas. j'hausse les épaules.

Mignonne Esfir se met à pouffer. "Alors ça, ça restera dans les anales comme répartie." Oui hein, j'ai rarement fait une aussi belle phrase à sept heures du mat avec la tête dans le cul et plus d'alcool que de sang dans le corps, c'était sublime. Tellement sublime qu'elle le répète à sa sauce, comme une petite peste de bac à sable qui tenterait de martyriser le pauvre binoclard sans amis. Non vraiment, c'est mignon, elle a gardé son âme d'enfant. Je la regarde le sourire aux lèvres, attendri par ses paroles et son charmant sourire.

Chassez le naturel, il revient au galop. Voilà qu'elle reprend son air de pétasse et qu'elle enchaine. Apparemment elle veut faire la conversation, je vais finir par croire qu'elle m'aime bien. "Elle va bien ta gonz, Felicis ? Ou Ava, je sais pas." Je manque de rire et de rejouer la scène de la petite peste de bac à sable en répétant bêtement sa question, mais je me retiens. Visiblement, il me reste encore une part de cerveau suffisamment sobre pour éviter de me péter la honte. Un véritable exploit. Au lieu de ça, je hausse les épaules à mon tour. Aux dernières nouvelles, je les satisfaisais tellement pas qu'elles ont décidé de se mettre en couple entre elles, je réponds plutôt, regardant par la vitre le nom de la prochaine station.

Feuerbach hausse les épaules. Apparemment, il veut me montrer que ça lui fait rien cette situation, il va même jouer sur le ton de l'humour. Aux dernières nouvelles, je les satisfaisais tellement pas qu'elles ont décidé de se mettre en couple entre elles, il regarde à travers la vitre. J'hausse les yeux vers le ciel, mesurant l'absurdité de son propos complètement faux. Felicis alterne avec Swako et Feuerbach, jamais avec Rivers. Puis, Rivers, personne ne veut d'elle, c'est une coincée du cul celle-là, un jour elle baiser avec ses vêtements.
C'est triste de te dénigrer comme ça. Je dis, l'air de peste, regardant moi aussi à mon tour par la fenêtre. Mais c'est vrai qu'avec sa grosse foufouna faciale, ça va pas le faire. Genre tu roules une pelle à Ezra, t'as l'impression de lui faire une fellation vaginale. Enfin. Tu devrai raser ta grosse fouffe, ça irait mieux Feuerbach. je lance, l'air vicieux.

"C'est triste de te dénigrer comme ça." Oui hein, quelle tristesse, oh mon dieu ça m'arracherait presque quelques larmes. Je fais la moue, rentrant dans son jeu. Pas le choix quand on est précoce, je chuchote d'un air triste en regardant mes chaussures, et soupire. Honnêtement, j'espère qu'elle est pas suffisamment attardée pour croire à ce qu'elle raconte. J'ai eu autant de vues sur Ava que sur le lapin en peluche qui me servait de doudou quand j'étais gamin - c'est-à-dire aucune - et la relation qu'entretient Sam avec Boucle d'Or ne regardent qu'eux, tant pis pour eux s'ils ne réalisent pas qu'ils sont voués à l'échec, c'est leurs histoires. Moi j'aime juste faire chier le peuple, ahah.

Le métro ralentit sur la station à laquelle je compte m'arrêter. Je passe une main sur mon visage pour tenter de me réveiller comme je peux; la nuit a vraiment été longue. C'est à ce moment là que ma chère voisine décide de l'ouvrir encore. Encore ? Ouais. Je vais finir par croire qu'elle m'aime bien, à force qu'elle relance la conversation comme ça. "Tu devrais raser ta grosse fouffe, ça irait mieux Feuerbach." Han, qu'elle est attachante. Je la regarde à nouveau d'un air attendri. Elle est mignonne, vraiment. J'y penserai, merci du conseil, je réponds en me levant, le sourire toujours accroché aux lèvres. Une fois le métro arrêté, j'ouvre la porte et en sors, tout en saluant de la main ma compagne de trajet. Maintenant, direction mon lit.