Hm, ça pique un peu ce froid. Faut dire que sortir d'une salle chauffée à 25°C et tomber dehors sur des températures négatives ça fait rarement du bien. M'enfin, ma journée de boulot est finie et une soirée se profile avec d'autres bleus alors on arrête de se plaindre on rentre à l'UE se changer et on retourne dans le cœur de la city Montréal. Ça fait un petit moment que je me suis pas mis une cuite à la bière et je veux pas attendre plus longtemps!

Quelques heures après le boulot, changée, maquillée et parfumée je reprend la route de la capitale, toute heureuse d'aller en soirée. Ça fait gros trou de dire ça mais vraiment, me laisser aller en soirée, j'adore. Personne n'est dans son état normal, on se fiche bien d'avec qui on est pote ou non, le bonheur en somme! Alors vous me connaissez, je vais pas manquer ça. Puis le rendez-vous se situe dans une brasserie branchée, qui dit brasserie dit bière alors j'ai aucune excuse pour ne pas y aller. Au contraire je dirai même, que de bonnes raisons. L'abus d'alcool est dangereux pour la santé cela dit, même si j'ai fortement l'impression dans faire l'apologie. Ahem.

Enfin quoiqu'il en soit me voilà dans le centre ville et malgré les températures très basses, ça grouille de monde. Si bien que part moment on est obligé de descendre des trottoirs pour avancer, les bars étant plein à craquer des clients se poste devant les devantures. L'alcool réchauffe dit-on.

Je vois enfin apparaître la brasserie, vous pouvez imaginer la joie qui me prend d'un coup eheh. Je rentre dans le bâtiment et retrouve quelques amis bleus un peu entamés. Ils m'ont pas attendus ces saligots. J'exprime mon pseudo-agacement sur le ton de la plaisanterie et me commande un verre à mon tour. La soirée peut commencer yihaa!

Aujourd'hui c'est la merde. La grosse merde même. J'ai pas l'habitude de me plaindre mais là, mon dieu je suis au fond du trou, aujourd'hui ça fait 10 putains d'années que ma mère est morte, rah, ça me fait chier, je m'sens tellement mal, j'ai juste envie de frapper tout ce qui bouge, pourquoi moi ? C'est vrai ça, pourquoi ? J'avais 10 ans, c'est pas juste. Vraiment pas putain. Who, faut que j'me calme et que j'évite de sortir de ma chambre sinon je vais insulter les passants, oui je vous jure, même un ange comme moi peut péter des câbles. J'essaye de me calmer en inspirant et en expirant. Calme Anna, calme. Ça marche quelques minutes mais ça me fait vite chier, putain je vais craquer. Faut que je bouge, ouais c'est ça, faut que je bouge, que je sorte et faut que je me bourre la gueule, ça m'a l'air d'être une bonne idée ça. Ouais non en faite, fin' je sais pas je suis une sainte moi, je touche jamais à l'alcool, c'est pas maintenant que je vais commencer quand même.

Oh et puis merde hein, j'ai 20 ans sérieux, je peux me lâcher quand même. Bon par contre le pyjama avec les petits cœur ça va pas le faire eh... J'enfile un jeans, un petit chemiser et je lâche mes longs cheveux blonds. Bon, on y va. J'ai un seul objectif : oublier.

J'avais entendu parler d'une petite soirée dans un bar, je me rends donc dans le centre ville d'un pas décidé, faut que j'y aille, j'en ai besoin en faite. C'est rempli ici, y'a un monde fou. En même temps le samedi les gens sortent, ils sont pas tous comme moi. Je suis devant le fameux bar, j'inspire et je pousse la porte. Personne ne me remarque, tant mieux. Je me dirige vers le bar et je commande un verre de vodka, ouais carrément, j’exagère peut être mais j'en ai marre de faire la sainte ni-touche voyez vous.

Je sais pas si j'ai bu dix ou deux verres mais ma tête tourne vraiment fort, j'me sens légère, j'ai envie de vomir un peu mais bon. Je prends une grosse poignée de cacahuètes et je les mange comme si ça faisait 4 ans que j'avais plus rien avaler. Je me sens bien, libre, j'essaye de descendre de mon tabouret mais je m'écroule parterre, je rigole et j'essaye de me relever en m'agrippant à une fille qui s'trouve devant moi.

Oh salut toi... désolé j'suis un peu bourrée... je crois, oh tu as des cheveux super beaux.

Je touche ses cheveux blonds, oh ils sont doux. Je rigole doucement en essayant de pas trébucher, woo, c'est pas facile. Je m'abaisse et j'enlève mes talons en rigolant. Je les jette un peu plus loin.

Voilà qui est mieux.

Je dis en agitant mes petits orteils à l'air libre. J'suis libéréeee délivrééée, oh que je suis drôle !

Alors que j'entamais sereinement ma première pinte de bière - que j'attendais la bave aux coins des lèvres depuis 10 minutes - je sentis une tension sur mon gilet, ça me tirait vers le bas. Je me retourne sagement - pour éviter de renverser mon précieux verre - en regardant vers le bas et je m'aperçois qu'une gonzesse essaye de se relever, les pieds empêtrés dans son tabouret. À mon avis elle vient de se casser la gueule. Et elle m'a pas l'air sobre, loin de là même. Oh salut toi... désolé j'suis un peu bourrée... je crois, oh tu as des cheveux super beaux, dit-elle en s'aidant de mon bras pour se relever et en touchant mes cheveux. Je la regarde de haut en bas, l'attitude blasée. Elle se prend pour qui elle? Elle a cru que mes cheveux c'était une autoroute ou bien? Et tire encore sur mon gilet tu le rembourseras. Je vous avouerai que sur le coup je suis restée silencieuse, je me demande encore si je dois laisser couler et si ma main me démange trop pour rester dans ma poche. Elle fini par se déchausser et balancer ses escarpins à l'autre bout de la pièce. Voilà qui est mieux. Ah bah oui je vois ça. Bon, à y réfléchir elle a pas l'air si malsaine que ça. Je pense qu'il faudrait l'aider elle a l'air paumée, enfin elle a pas la tête d'une fille qui s'en met une tous les soirs quoi. Elle vient peut être de se faire larguer, faudrait pas qu'elle fasse une connerie en sortant de là. Ivy, c'est l'heure de la bonne action du jour. Ne pas la laisser repartir dans cet état là, d'autant plus qu'elle doit faire partie de l'UE si elle est là. Je dépose donc ma bière sur le comptoir et engage la conversation avec elle. Je pense qu'il faudrait que tu t'assoies sur un tabouret plus près du sol que ceux-là, je dis dans un premier temps. Si tu veux je t'invites à aller t'asseoir à une table par là. Je montre du doigts la rangée de place assises disposées contre le mur. En espérant qu'elle ait pas l'alcool mauvais ahem.

Je regrette un peu d'avoir balancé mes escarpins, bah, tant pis au pire je retournerai pieds nus, comme Kirikou non ? Lui il marche toujours pieds nus, alors ça ne devrait pas me faire de mal. En plus avant il n'y avait pas de chaussures, ça n'existait pas, j'vais pas mourir quoi. Je vais essayer d'entrer dans la tribu de Kirikou, c'est mon but en 2016. Bon après ils sont tous à poils c'est un peu étrange, mais je vais m'habituer, l'humain s'adapte non ? Purée mais je suis vraiment désespérée, j'envisage d'entrer dans une tribu à l'autre bout du monde... Je ris toute seule et elle me lance un regard du genre "oh toi t'es vraiment mal là", bah ça va c'est pas comme si tous je faisais ça tous les jours, c'est exceptionnel ! "Je pense qu'il faudrait que tu t'assoies sur un tabouret plus près du sol que ceux-là", Oh ça ouais, elle a raison, je rigole la gorge déployée, oh je trouve que tout est marrant, faut que j'me calme, on va me prendre pour une dingue, ce que je ne suis pas hein ! Pas du tout, je suis super clean comme nana ! "Si tu veux je t'invites à aller t'asseoir à une table par là." Oh, elle m'invite, quelqu'un s’intéresse à moi, c'est génial, je ne passe pas inaperçue comme à mon habitude ! Je souris en hochant la tête et je la suis comme un gosse de 5 ans, je sautille un peu partout et je manque de tomber à plusieurs reprises, on s'assied et je ramène mes jambes à ma poitrine.

Je m'appelle Anna, c'est gentil de me proposer de m’asseoir, je commençais à avoir mal au pied,bon après faut que je m'habitue à marcher pieds nus si j'veux intégrer la tribu. Et toi,.. Tu as une tête à t’appeler Charlotte !

Je dis à la bonde qui a une tête à s’appeler Charlotte, elle doit sûrement rien comprendre à ce que je raconte mais bon. En tout cas elle est gentille avec moi, elle ne me laisse pas dans la merde et elle propose de m'installer avec elle, c'est une gentille, faut que je grave son visage dans mon petit cerveau parce que je lui dois une dette, bon en attendant j'vais essayer de me remettre de cette tête qui tourne. J'étends mes jambes et je les mets sur la table pour être plus à l'aise.

La fille accepte. Je souffle de soulagement, j'imaginais pas ma réaction si elle m'avait dit non. Les gens chiants comme ça je vous jure. J'aurai abandonné avant même qu'elle se remette à courir partout, comme elle le fait là mais pour rejoindre la table que je lui avait indiqué. Une fois assises, enfin parlons pour moi, elle, elle est recroquevillée, les genoux contre sa poitrine. On dirait un enfant je vous jure, qui a fait une connerie et qui sait qu'il va se prendre une rouste. Sauf que cet enfant là est bourré et rigole comme une canne. Je m'appelle Anna, c'est gentil de me proposer de m’asseoir, je commençais à avoir mal au pied,bon après faut que je m'habitue à marcher pieds nus si j'veux intégrer la tribu. Et toi,.. Tu as une tête à t’appeler Charlotte ! Euh, OK. D'accord oui je vois, les tribus, les Charlotte et tout. Ahem, l'alcool est mauvais pour la santé hein. Bon, reprenons dans le bons sens. Elle s'appelle Anna - enfin c'est ce qu'elle m'a dit, ça se trouve elle s'appelle Bernadette j'en sais rien -, elle a mal au pied - bizarre, entre escarpins et pieds nus je préfère la deuxième proposition - et elle croit que je m'appelle Charlotte. Je vais pas la frustrer, ce soir je m'appellerai Charlotte hm hm.

- Tout à fait, tout à fait. Tu m'as l'air seule, qu'est ce que tu es venue faire ici ce soir?

Et toute seule aussi. Je sais pas, quand on prévoit de se mettre dans cet état là on vient au moins avec quelqu'un, ça n'a aucune sens de s'en mettre une seule quoi. Puis pour rentrer mieux vaut être deux.

Elle ne me contredit pas, donc elle s'appelle Charlotte je suppose, wow c'est génial, j'ai visé juste du premier coup, j'ai de la chance aujourd’hui, je vais sûrement jouer au loto demain, je vais sûrement gagné avec la chance que j'ai, enfin je m'emporte. "Tout à fait, tout à fait. Tu m'as l'air seule, qu'est ce que tu es venue faire ici ce soir?" , Ouais en effet je suis toute seule, je suis une paumée, une véritable paumée qui essaye d'oublier quel jour on est en se noyant dans l'alcool, une véritable paumée ridicule en faite, c'est ça que je suis. Oh non, l'alcool ne me rend plus heureuse, je commence à déprimer, putain c'est quoi cette merde. Je soupire en levant les yeux vers Charlotte.

Putain, ouais j'suis toute seule, je suis venue me bourrer la gueule parce que aujourd'hui c'est un jour de merde.

Ma vie est carrément nulle, j'aurai du rester chez moi, devant la télévision à mater les vieux albums de ma mère et a chialer en silence, c'est vrai ça qu'est-ce que je fous ici sérieusement ? C'est pas mon milieu, je déteste l'alcool et je suis bourrée après deux verres, j'suis juste ridicule en faite. Je mets ma tête en arrière et je regarde les spots qui me brûle la rétine. Je vais déprimer la pauvre blonde maintenant. Bon faut pas que j'chiale, purée l'alcool ça me fait changer d'attitude en un rien de temps, c'est dingue. J'ai envie de vomir maintenant.

Putain, ouais j'suis toute seule, je suis venue me bourrer la gueule parce que aujourd'hui c'est un jour de merde, dit-elle avant que sa tête ne bascule en arrière. Ah ouai je vois ça. Une journée de merde en effet. Bon, faut pas que lui dise ça on est d'accord, ça la mettrait encore plus au fond. Soyons conciliants donc. Je m'appelle Charlotte, elle s'appelle Anna et ce soir nous serons amies pour lui éviter des conneries. Ah oui, y a des jours dont on se passerait bien. Moi c'est le lundi par exemple, la reprise des cous c'est jamais simple ahem. Mais faut pas se foutre mal pour ça - et c'est moi qui dit ça kuf kuf -. Et je pense que dans son état faudrait mieux pour elle qu'elle rentre, qui sait si le gérant appelle pas la police parce qu'elle les dérange trop lui et ses clients. T'habites où? Je vais t'appeler un taxi tu peux pas continuer la soirée comme ça, ça va mal tourner pour toi.. T'es sûre que t'es toute seule, y a vraiment pas une personne que tu connais ici? C'est pas que ça me gonfle de jouer les baby-sitter mais si elle avait un pote censé qui traînait dans les parages ça m'arrangerait bien. Je la connais pas cette fille donc bon.

J'attrape un sacré mal de tête, j'ai l'impression qu'elle va exploser et que des bouts de cerveau vont finir un peu partout dans la pièce, glauque je sais. Ah oui, y a des jours dont on se passerait bien. Oh que oui, si je pouvais rayé ce jour de la surface je le ferai sans hésiter. Mais faut pas se foutre mal pour ça Oh ça va c'est la première fois que je me fous en l'air pour ça, chaque année j'ai tenu. Mais là je suis loin d'ma famille du coup je perds pied. T'habites où? Je vais t'appeler un taxi tu peux pas continuer la soirée comme ça, ça va mal tourner pour toi.. T'es sûre que t'es toute seule, y a vraiment pas une personne que tu connais ici? M'ouais je connais pas vraiment des gens ici, j'en connais de vue mais sans plus quoi. Je vais me débrouiller c'est bon. Ça va aller, je vais rentrer à pied, je vais à l'université, c'est pas loin. Je dis en essayant de me lever, je fais quelques pas mais je manque à nouveau de m'écrouler, putain fait chier pourquoi j'ai bu moi aussi. Faut que je sorte, je commence à manquer d'air.

Elle semble se foutre totalement de ce qui pourrait lui arriver. L'alcool je vous jure, c'est dangereux. Ça va aller, je vais rentrer à pied, je vais à l'université, c'est pas loin. C'est pas loin, tcheu. T'es un peu américaine sur les bords, tout ce qui est grand leur semble facile à faire, ça les perdra je vous le dis. M'enfin, je sais pas d'où elle nous vient donc bon, ne tirons pas de conclusions hâtives, c'est peut être une européenne paumée, une néerlandaise en vacances - m'ont dit qu'ils buvaient pas mal ces gens là -. Quoiqu'il en soit je vais pas la laisser repartir toute seule, j'en aurai mauvaise conscience, puis si il lui arrive un truc je me sentirai carrément coupable. Bon, aller Ivy, raisonne toi, louper une soirée n'aura pas raison de toi et tes envies. Y en aura d'autre, une de perdue, dix de retrouvées, c'est comme ça le dicton. Mh, d'un côté ça pourrait marcher sur elle, une Anna de perdue... RAH NAN! Qu'on m'ôte ces pensées sur le champ, c'est malsain m'enfin.

Tut tut, je finis par dire. Laisse moi te ramener, je connais la route je suis aussi de l'UE. Même plus étonnée de croiser des Enamoriens dans Montréal. Je me lève donc de la table, décidée à tout. Si j'hésite trop longtemps je vais la laisser partir seule donc autant agir. Heureusement que je me connais hein. Ma voiture est garée à deux pas d'ici. Si t'arrives à tenir, je fais ma voix descendant progressivement d'un ton lorsque je la vois aligner trois pas dans trois directions différentes. Faut avouer qu'aller à gauche, en même temps à droite et tout ça en reculant, ça relève de la magie! Je me permet donc de passer son bras gauche par-dessus mes épaule pour lui servir de béquille et je quitte le bar, saluant de la tête mes camarades bleus. Aller, une centaine de mètres c'est rien nan?

Bon je crois pas que je vais y arriver seule, de plus l'université était quand même loin... J'avais pas bien fait mes calculs. De toute façon je me serai sûrement retrouvé étalée dans la neige. J'aurai fini gelée et ça aurait été la fin pour moi. Je suis désespérée mais pas au point de crever comme une conne. Je tourne la tête vers la blonde (ma sauveuse) Laisse moi te ramener, je connais la route je suis aussi de l'UE. Décidément, j'ai eu de la chance de tomber sur cette gonzesse, sans elle je n'aurai pas pu survivre dans ce foutu bar. Ma voiture est garée à deux pas d'ici. Si t'arrives à tenir, Bon, je vais essayer. Oh, merci. Elle passe un bras sous mes épaules pour m'aider marcher, j'ai l'impression d'avoir oublié quelque chose... C'est seulement une fois dehors quand mes pieds rentrent en contact avec la neige que je m'en souviens. Merde mes chaussures. Wow, c'est vachement froid. Je dis en faisant une grimace, au moins je vais marcher plus vite. On fait quelques mètres, mes pieds vont tomber, enfin on atteint la voiture et je me rue dedans. 36 fois merci.
Je dis en frottant mes pieds gelés.

Anna accepte que je la ramène. Hourra, ma BA du jour sera validée nieh. Et je n'aurai pas son éventuelle mort sur ma conscience, une bonne chose de faite. Avec mon aide je parviens à extirper ma nouvelle "amie" du bâtiment et nous commençons à remonter la rue. Au bout d'un dizaine de mètres je l'entends se plaindre du froid, je vous avouerai que j'ai pas plus fait attention à son baragouinage et que j'ai tracé ma route - et la sienne par ailleurs -, ce n'est qu'en arrivant au parking que je m'aperçois qu'elle est pieds nus. Fichtre, ça m'était complètement sorti de la tête son jeté d'escarpins à travers le bar, je me sens bête maintenant. 36 fois merci, me lance-t-elle avec le peu de coordination qu'elle trouve dans sa voix. Beh de rien hein mais tes chaussures? Je stoppe ma pensée quand je la vois heureuse comme tout, assise sur le siège passager. Comme quoi il en faut pour être... Enfin vous connaissez la chanson. J'oublie donc les escarpins, ferme sa porte et grimpe côté conducteur, le contact mis je quitte le parking et prends la route et comme j'ai peur qu'Anna s'endorme, j'essaie de lui taper la causette sur le trajet pour pas la perdre. Alors, qu'est ce qui t'amène ici?

J'ai la tête qui tourne vachement, j'ai jamais été à l'aise en voiture alors bourrée... J'espère que j'vais pas dégueuler dans sa bagnole, ce serait l'pompon tiens. Je me concentre sur un point fixe quand elle me demande ce qui m'amène ici, ouais ok mais ici ou ? Au bar où à Montréal ? Bah au pire je réponds aux deux, on a l'temps. Au bar c'est parce que c'est un jour de merde parce que ça faisait 10 ans qu'ma mère est morte, pas la joie quoi.Pis' suis venue à Montréal parce que apparemment j'ai un talent de journalisme mais en faite nan, je loupe tout, je foire tout ce que j'touche putain. Bah ça y est, j'explose, ça devait bien arrivé. Je sens des larmes coulées sur mes joues, putain mais merde quoi sérieux.Merde, je suis désolée. Je dis en mettant ma tête contre la vitre. J'en ai râle cul d'être la sainte nitouche coincée du cul, j'en ai râle cul d'étudier et j'en ai râle cul de ne toujours pas avoir fait le deuil de ma mère. Ma vie est un immense merdier. Je chiale encore plus fort, désolée, je m'en veux de lui faire subir ça, merde quoi. La pauvre, elle vient juste passer une bonne soirée et elle finit assistante pour handicapés.

Au bar c'est parce que c'est un jour de merde parce que ça faisait 10 ans qu'ma mère est morte, pas la joie quoi.Pis' suis venue à Montréal parce que apparemment j'ai un talent de journalisme mais en faite nan, je loupe tout, je foire tout ce que j'touche putain, elle fini par me déballer, la voix tremblante et l'émotion perçante. Je reste sur le cul, tentant de me concentrer sur la route. Je l'entends gémir contre la portière, elle pleure sûrement. Je sais pas quoi dire du coup, me racler la gorge dans un premier temps, histoire de pas parler comme une chèvre. La pauvre, les anniversaires comme ça, ça vous replonge dans des souvenirs, ça vous prend le cœur, vous le serre, vous compter les jours sans ces personnes, ce que vous auriez pu avoir comme autres souvenirs si ça n'étais par arrivé. La gorge serrée je m'excuse dans un premier temps, sûrement pour me déculpabiliser de ce que j'ai pu penser d'elle à première vue, tout à l'heure au bar. En soit je ne suis responsable de rien concernant le décès de sa maman mais je ne savais pas. Désolée... pour toi, j'arrive même pas à rebondir sur la suite de ce qu'elle a dit. Merde, je suis désolée.

- Nan, nan t'excuses pas. Franchement tu as toutes tes raisons. Tu voulais oublier, tu voulais te changer les idées, je comprends, t'inquiètes... Je respecte... je finis par dire, gênée et troublée par cette révélation.

La route va être rude, aussi courte soit-elle.

Je sais pas pourquoi j'ai balancé ça, j'aurai jamais du franchement. Quelle gourde. Je frotte mes yeux avec ma manche pleine de morves, c'est très frais. Je soupire, calme toi Anna, chialer comme une madeleine ça ne va pas t'aider. Désolée... pour toi Oh non t'excuses pas, je déteste les gens qui s'excuse. S'excuser de quoi ? C'est pas de leur faute, c'est la faute de personne, c'est juste la faute de la vie. Enfin de la mort comme vous voulez. Mais bon, je la comprends, elle ne s'y attendait pas. Je ferme les yeux quelques instants histoire de me calmer. Nan, nan t'excuses pas. Franchement tu as toutes tes raisons. Tu voulais oublier, tu voulais te changer les idées, je comprends, t'inquiètes... Je respecte... J'aurai quand même pas du, c'est sympa de sa part d'essayer de me rassurer mais c'est une grosse erreur d'être venue ici, dans un bar quoi, moi dans un bar. C'est un comble. Je touche presque jamais à l'alcool. Je hoche la tête.

Ouais, merci. Je suis sûre que tu ne t'appelles pas Charlotte en faite, c'est quoi le prénom de ma sauveuse ?

Ouais, merci. Je suis sûre que tu ne t'appelles pas Charlotte en faite, c'est quoi le prénom de ma sauveuse ? fini-t-elle par dire, séchant ses larmes. Elle tente d'ironiser, ça prouve sa force je trouve, malgré l’événement de regarder de l'avant, d'essayer d'outrepasser la douleur sans pour autant en oublier le sens, c'est normal de souffrir pour ce type de jour, on ressasse le passé, on regrette. Je souris, essayant de ravaler mes larmes - faut dire qu'elle m'a ému cette petite blondinette -. T'es perspicace, je dis dans un premier temps, pouffant un peu. Moi c'est Ivy!

Les présentations faites, je vois que je suis face à une personne bien, qui a franchement l'air sympa malgré la sale journée qu'elle vient de passer. Je comprends son geste même si c'est pas le plus raisonnable, enfin qu'est ce qui est raisonnable dans ce genre de moments? Je voudrai bien le savoir hein mais je doute quand même des contre théories. La route se fini tranquillement, dans une atmosphère mi-détendue, mi-tremblante. La nuit va être dure pour Anna, quoique l'alcool pourrait aider - ou lui pourrir la nuit, on connaît tous ses effets secondaires ahem -. Nous voilà, je lui dis dans un premier temps puis, songeant à quelque chose, je descend en premier et ouvre le coffre de ma jeep. Je savais bien qu'elles étaient restées là elles. Je sais pas si on fait la même pointure mais ça t'épargnera les pieds jusqu'aux dortoirs, je lui dis une fois à sa portière, lui tendant par la fenêtre mes tennis de sport. Faut dire que je les ai pas sorti depuis mon dernier footing il y a, ouf, au moins deux bons mois.

T'es perspicace Je souris, en effet, pourquoi je l'ai appelé Charlotte sérieusement, je suis conne dès fois, bon j'ai une excuse : l'alcool, c'est une bonne excuse non ? Enfin je pense... c'est Ivy! Ivy c'est mignon, on dirait un diminutif. Joli prénom. Je dis en jouant avec le bouton verrouillé de la fenêtre. Le trajet est long, enfin j'ai l'impression, je commence à fatiguer et je manque de m'endormir plusieurs fois, j'ai l'impression que j'vais vomir et m'évanouir en même temps. Je sens qu'on ralenti, j'ai hâte de sortir de cette bagnole. Nous voilà Alléluia, je pousse tant bien que mal la porte, je regarde mes pieds et je n'entends même pas Ivy aller dans le coffre, elle revient en quelques secondes avec des chaussures de sport. Des chaussures, génial. Je la remercie et j'enfile les godasses, je ferme à peine les lacets, j'ai plus de force. On marche jusqu'au dortoir, j'avance tant bien que mal. Une fois devant j'essaye de me rappeler mon numéro de chambre, j'en ai aucune idée. Je me tourne vers Ivy,Je sais plus mon numéro de chambre... Je dis en soupirant, j'en ai marre de moi, j'ai juste envie de m'étaler là, au pire je dormirai dans le couloir, je suis tellement crevée que je pourrai m'endormir parterre sans soucis. Bon après je préfère mon lit mais bon, quand on a pas le choix, la blonde me tient toujours les épaules, heureusement parce que je serai déjà à terre je pense.

On parvient tant bien que mal à rejoindre les dortoirs, pour ensuite entamer la montée des escaliers. Bah je peux vous dire qu'on est pas rendu, heureusement que c'est le week end parce que je me voyais mal expliquer mon retard - voire mon absence - au prof de zootechnie. J'ai aidé une pauvre fille rencontrée dans un bar à rejoindre sa chambre, du coup j'ai oublié de régler mon réveil, aïe. Quoique les surveillants viendraient peut être me réveiller avant ça, histoire que je loupe pas le déjeuner. Enfin nous y voilà, on grimpe quelques marches difficilement et Anna lâche accompagnant le tout d'un soupir : Je sais plus mon numéro de chambre... Ahah, c'est une blague? Je partage déjà ma chambre avec quelqu'un, je peux pas lui passer son lit - ni le mien d'ailleurs, j'ai droit à un minimum de confort -, et même j'ai pas de matelas gonflable ou supplémentaire à lui passer. Dans le même temps je vais pas la laisser coucher sur le pas de la porte donc va falloir solutionner tout ça, sans réveiller les pions parce que j'imagine pas l'histoire, renvoyée de l'UE car présentation en état d'ébriété. Faut que je l'aide y a pas 36 solutions! Viens avec moi, je vais te confectionner un lit de fortune. Je l'amène dans notre chambre, y a toujours une couette et des oreilles supplémentaires dans les armoires, suffit juste que je prenne la couverture en trop de ma coloc, ça fera le matelas, puis la couette de mon armoire et tous nos oreillers pour la caler. Puis on rajoutera un saladier au cas où ça part si vous voyez ce que je veux dire.

20 minutes plus tard le campement de fortune est fini. Vas-y, étale toi de tout ton long, en sous-vêt, à poils, je suis pas pudique fais comme tu le sens! Moi je file me changer dans la salle de bain et je me fou dans mon lit, je pense qu'Anna dormira à poings fermés quand je reviendrai. Que d'émotions ce soir.

Viens avec moi, je vais te confectionner un lit de fortune. Oh dieu merci, franchement quand je serai en état je la remercierai de toutes mes forces, elle pourra me demander ce qu'elle veut, j'accepte quoi qu'il arrive, on voit directement les gens qui ont une bonne nature dans c'putain d'monde. J'ai eu de la chance, j'aurai pu tomber sur quelqu'un de malintentionné ou quelqu'un qui m'aurait simplement laisser pour morte sur le trottoir. On sait jamais ce qu'il peut arriver. Je la remercie et je la suis dans sa chambre, je la regarde faire je m'assied parterre parce que je ne sens plus mes jambes, ni mes pieds.

Une fois le lit fait elle se tourne vers moi. Vas-y, étale toi de tout ton long, en sous-vêt, à poils, je suis pas pudique fais comme tu le sens! Je souris, je me racle la gorge, j'ai presque plus de voix, ma tête me lance, mes yeux sont gonflés. Merci... Je m'approche d'elle et je la prends dans mes bras. C'est la moindre des chose. J'enlève mes chaussures, mon jeans et ma veste, je reste en t-shirt et en culotte. Je prends mes genoux et je les ramène à ma poitrine, je m'endors en deux minutes, le cœur lourd.