J'émerge difficilement. Ah bordel à putes, j'ai un de ces mal de crâne de dingue, j'ai l'impression de m'être prise un chaudron dans la gueule, c'est horrible. Et j'ai aussi la désagréable impression qu'on m'assomme à moitié le côté gauche. Je me frotte les yeux d'une main, ouvrant difficilement les paupières. Ça faisait longtemps qu'j'avais pas fini cuite comme ça putain. J'veux une aspirine et un verre d'eau. J'suis pas habituée à finir raide morte comme ça là, merde. J'préfère être en totale possession de mes moyens, me regardez pas comme ça.

Je vais pour passer ma main gauche dans mes cheveux, main que je pensais seulement retenue par le poids de mon imagination. Beh non. En essayant de me refoutre les yeux en face des trous, je m'aperçois qu'un truc est moitié étalé sur moi. Comprenez un mec. Un mec qui me dit rien. Mais alors absolument que dalle. Ok. Normal. Enfin pas t'à fait. Mais merde. C'est qui ? Autre détail dont je me rends compte : j'ai perdu mon short, ma veste, mes pompes et mon crop-top. Vive la dentelle noire les gars. Mais j'crois qu'un des trucs les plus pires de l'histoire, c'est que j'arrive pas à savoir ce que j'ai pu branler avec l'épave qui est couchée à mes côtés. Voilà pourquoi j'aime pas être bourrée, si t'as passé ta nuit à t'éclater avec ton partenaire, tu t'en souviens à peine.

Ai-je couché avec ce type, j'en ai pas la moindre idée. Vous non plus j'suppose. Bon au pire. Une fois de plus ou une fois de moins, on s'en fout. Faut juste que je retienne quelques détails physiques. Si jamais j'chope une saloperie je le défonce. Il est grand, pâle comme un mort - d'ailleurs on dirait qu'il est mort, c'est à peine si on le voit respirer - et il a pas l'air épais. Ok. Ça suffit. Faut que j'me casse, la migraine se calmera pas sans médoc.

Je tente de me défaire du truc, mais j'ai l'impression que c'est pas possible. J'hésite à l'envoyer dire bonjour à la moquette mais ma conscience - ouais j'en ai encore une - m'interdit de le faire. Même si j'ai l'impression que si ça continue j'vais pouvoir aller me faire refaire le sein gauche. Cool. J'essaie par tous les moyens. On va éviter de le réveiller, hein. J'sais même pas s'il est vivant mais bon. C'est peut-être pour ça qu'il est si lourd, il est mort. Non aller, j'arrête de raconter des conneries et j'me concentre.

Par la magie du saint esprit, je réussis à m'extirper du bonhomme en évitant de l'envoyer valser, et me lève. Où sont mes fringues ? Oh tiens. Une chaussure là bas. C'est la mienne. Pourquoi elle est de l'autre côté du lit, qu'y a une montagne de bordel, que la pièce est petite ? J'me prends pas la tête. Pas le temps, pas la foi. Je grimpe debout sur le lit, et décide que le chemin le plus direct entre moi et ma chaussure c'est la ligne droite. C'était sans compter les pieds du type que j'avais oublié de voir.

Je m'étale lamentablement sur le matelas, et pour le coup, cette fois, c'est moi qui écrase le mec. Et comme si ça suffisait pas, quand j'veux me relever, je loupe une phase - laquelle j'sais pas - mais j'me retrouve le cul par terre. Je sais aussi pourquoi jbois pas. Parce que j'suis aussi douée qu'une Moonstone au réveil. Sans me soucier du cadavre plus si mort que ça, je rejoins ma chaussure.

Les réveils en sursaut, c'est pas ce qu'il y a de plus agréable. Surtout avec une telle gueule de bois. Surtout quand on comprend rien de ce qui nous arrive. C'est un bruit sourd qui me sort d'un sommeil profond. Je me relève aussitôt, et ne capte absolument rien. Mais genre, vraiment rien. Je suis dans une chambre que je ne connais pas, et juste devant moi se trouve une fille que je ne connais pas plus. Enfin sa tête me dit quelque chose, mais sur le coup je serais incapable de dire d'où je la connais. Et faut dire qu'elle n'est pas des plus vêtues. Premier réflexe : je me frotte les yeux pour vérifier que je ne suis pas en train de rêver, et que je suis bien réveillé pour de vrai. Et malheureusement, c'est le cas. Je suis tout ce qu'il y a de plus éveillé. Putain. Deuxième réflexe : en la voyant en si petite tenue, je soulève la couverture sous laquelle j'étais moitié étalé, pour vérifier que j'ai quand même mes fringues sur moi. L'incompréhension continue, puisque je ne suis qu'en boxer. Mais qu'est-ce que j'ai bien foutu avec cette fille ? Incapable de me remémorer la soirée passée. Je me suis pris une bonne murge, ça c'est sûr, mais c'est à peu près tout ce dont je me souviens. Ça promet.

Troisième réflexe : je regarde la fille qui se démerde pour récupérer ses affaires, complètement paumé que je suis. Je la dévisage, l'air vide, l'espace de quelques secondes, avant de lui poser la première question qui me vient en tête : Euh.. T'es qui ? Puis je m'assois en tailleur, inspectant du regard les alentours du lit afin de retrouver mes affaires. Je ne compte pas rester en boxer éternellement, voyez-vous.

J'attrape ma chaussure. Où j'ai pu foutre le reste au juste ? Je passe une main sur mon front. Putain mais pourquoi j'me souviens de rien. Pourquoi je sais pas où sont mes fringues, qui est ce mec, et ce qu'on a fait cette nuit. Oh putain de merde. Je glisse mes mains dans mes boucles blondes, essayant de me souvenir, mais mes essais sont vains. Merde merde merde. Ça craint. « Euh... T'es qui ? »

Je me retourne, ma pompe à la main, jetant un coup d'oeil au mec assis sur le lit. Je le détaille de haut en bas. J'trouve qu'honnêtement, même bourrée, je choisis pas mal du tout. D'habitude j'les prends plus musclés. Mais si c'est que ça. Je m'avance vers le lit, déposant ma chaussure sur le matelas, gardant un oeil sur Gus.

- Shay. Jvois qu'j'suis pas la seule à pas me souvenir. Et à avoir mal au crâne, je fais avec un air moqueur en voyant la gueule de monsieur. Et toi, t'es qui en fait ?

Je passe de l'autre côté, grimpant de nouveau sur le lit en faisant gaffe où je mets les pieds, à la recherche de mes affaires. J'aperçois alors ma deuxième chaussure et mon short. Putain, mais mes fringues sont étalés dans la pièce, c'était sauvage ou quoi ? J'ai horreur de pas me souvenir putain, ça m'énerve t'imagine pas. J'sais même pas ce que j'ai fait avec l'inconnu, et si on l'a fait, j'pourrai même pas le classer dans la colonne bon coup, vu qu'j'en ai pas le moindre souvenir, ça craint. J'suis déçue.

- Bon alors. Dis-moi mon grand, qu'est-ce qu'on a foutu cette nuit ? On a joué aux dés ? C'était cool j'espère, je demande en enfilant mon short, revenant vers le type. Vu un peu comment t'es fait, ça devait l'être.

Parler, parler, ça donne encore plus mal au crâne. Je m'écrase à côté du vampire, passant mes mains sur mon visage, laissant retomber ma tête sur l'oreiller et mon bras sur mon visage. J'ai même pas envie de me lever tellement j'ai la flemme. T'façon, faut qu'je sache c'que j'ai branlé, et j'paierai pas plus cher assise. Ou couchée, y a pas vraiment de différence à vrai dire. Je garde tout de même un oeil sur mon partenaire, continuant de l'observer en essayant d'imaginer ce qu'on a bien pu faire. Et c'est pas l'expérience qui manque.

Elle s'appelle Shay. Merde, je suis persuadé de l'avoir déjà rencontré quelque part. Sûrement hier soir ou cette nuit, en toute logique. Mais aussi ailleurs. Elle me dit bien trop quelque chose pour m'être totalement inconnue. Mais d'où je la connais, ça c'est un grand mystère. J'apprends au passage que je ne suis pas le seul à n'y rien comprendre, dans un sens c'est rassurant ; quoique. "Et toi, t'es qui en fait ?" Je m'étire en râlant et masse ma nuque raidie, avant de lui répondre. Keith. J'ai l'impression que le simple fait de prononcer mon prénom est une torture. J'ai mal partout, même à la gorge. Sérieux, je sais pas ce qu'il s'est passé cette nuit, mais vu les conséquences, je crois que je veux à peine le savoir.

La blonde se promène un temps dans la chambre à la recherche de ses fringues, et se permet même de monter sur le matelas, évitant au passage de m'écraser les mollets. Quant à moi, je me penche à droite du lit afin de récupérer mon jean. Mon t-shirt et mes chaussures sont hors d'atteinte, et à cet instant, la motivation pour les récupérer est bien trop faible. Je me contenterai donc du simple pantalon pour l'instant, que j'enfile aussitôt.

"Bon alors. Dis-moi mon grand, qu'est-ce qu'on a foutu cette nuit ? On a joué aux dés ? C'était cool j'espère. Vu un peu comment t'es fait, ça devait l'être." Elle enfile ses fringues, puis revient s'écraser juste à côté de moi. Qu'est-ce qu'on a foutu cette nuit ? J'en sais franchement rien. Mais rien du tout. Je sais rien de ce qu'il s'est passé, ni comment on a atterri ici. Je sais même pas où on est. J'avais déjà des problèmes de mémoire, et là visiblement ça s'est pas amélioré avec la grosse murge que je me suis certainement prise. J'en ai strictement aucune idée, toi non plus je suppose ? Si tu trouves des dés dans la chambre, fais-moi signe, mais perso j'y crois pas trop. Je lâche un sourire en coin, cherchant à relativiser un minimum. Puis, par réflexe, j'attrape mon portable. Chose que je fais souvent dans ce genre de situations. Non pas que ça m'arrive régulièrement, disons juste qu'il m'arrive de temps en temps de faire des blackouts, et que mon portable m'est souvent bien pratique pour me remémorer certains événements qui ne me reviennent pas. Et justement, une fois de plus, je retrouve un "indice" dans l'album photos. Enfin, indice, c'est vite dit. C'est juste un selfie qui montre les gens avec qui j'ai passé la soirée. Tous bourrés visiblement. Et Shay est bien présente. Ceci dit, c'est pas ça qui va m'aider à retrouver ce qu'on a bien pu foutre cette nuit. Par hasard, cette photo te rappelle pas quelque chose ?, je demande au cas où à la blonde, toujours affalée sur le lit.

Keith. Je connais un Keith mais il a pas du tout cette tête là. C'est une sorte de grand truc épais, que tu t'amuses absolument pas à titiller si tu veux pas finir sans tes dents de devant. Comme quoi des fois, le prénom n'est pas le synonyme d'un physique. Enfin si vous voulez mon avis, toutes les Ashley sont des pétasses quand même. Là n'est pas la question. Je suis persuadée de connaître sa tête, pourtant je sais pas où et quand j'ai pu le rencontrer. A l'Université, certainement. Y a tellement de peuple. J'ai horreur de ne pas savoir. C'est probablement l'ami d'un ami d'un ami d'un ami du cousin d'un ami. J'ai pas envie de réfléchir, j'ai mal au crâne, c'est pas possible.

« J'en ai strictement aucune idée, toi non plus je suppose ? Si tu trouves des dés dans la chambre, fais-moi signe, mais perso j'y crois pas trop » il me répond avec un léger sourire. Je pouffe, le regardant du coin de l'oeil, sous mon bras, un sourcil levé. Je bascule sur le côté, le menton appuyé dans ma main.

- Tu supposes bien. Et j'vois franchement pas pourquoi tu doutes de notre partie de dés, elle me semble carrément évidente, je fais en laissant glisser le bout de mon ongle contre son bras.

Cela dit, je me laisse de nouveau tomber sur le dos, remontant mes genoux. J'aimerais quand même savoir où j'ai pu le croiser, la grande branche. Souviens-toi Shay, putain. C'est pas sorcier. Je passe ma main sur mon front, fermant les yeux. Réfléchis bordel. Ce serait pas mal de réfléchir à où t'as foutu ton top et ta veste, où se trouve accessoirement tes clopes. Et même avec la tête presque prête à exploser, j'ai besoin de la clope du matin. Addiction quand tu nous tueras. Question d'habitude. J'entends Keith bidouiller à côté de moi. J'ouvre les yeux alors qu'il me tend son téléphone, me demandant si la photo affichée à l'écran ne me rappelle rien. J'suis photogénique même quand j'suis pourrie, c'est cool. Même si j'fais une tête pas franchement glamour hein.

- Mmh. Pas vraiment. J'me souviens de l'asiatique à la tête de cul, sinon ça me dit pas grand chose. Tant que c'est pas parce qu'on a fait une partouze avant de s'isoler, ça m'va. J'aurais pas forcément voulu me frotter à tous ces gens efh.

Je lance un regard à Keith, et là, c'est la révélation.

- Putain je sais d'où j'te connais. Ta tête me disait quelque chose. T'es pas un pote à Jake ?

Jake c'est mon plan cul, le mec tatoué de presque partout et au cul de rêve. Ce mec est excellent, je l'adore tout simplement. On s'entend super bien, et pas que sous les draps. Et il me semble bien que j'ai croisé Keith, une fois que j'étais allée voir Jake. Ce mec a tellement de connaissances en même temps, c'est carrément dingue.

"Tu supposes bien. Et j'vois franchement pas pourquoi tu doutes de notre partie de dés, elle me semble carrément évidente." Je regarde du coin de l’œil sa main glisser sur mon bras, un sourcil arqué et mon sourire s'élevant à nouveau en coin. Puis je hausse les épaules, mine de rien. J'sais pas, un pressentiment sûrement ? Au moins, plus je la regarde, plus je me rends compte que, s'il s'est passé quelque chose, je regretterai pas. Parce qu'elle est loin d'être moche, en fait, donc bon. Mais c'est vraiment frustrant, parce que je sais que je la connais de quelque part, mais je suis incapable de me rappeler d'où.

Apparemment, Shay ne se rappelle pas de la photo. Au moins on est deux, c'est déjà ça, même si ça nous aide pas vraiment à se remémorer la soirée. "Tant que c'est pas parce qu'on a fait une partouze avant de s'isoler, ça m'va. J'aurais pas forcément voulu me frotter à tous ces gens efh." Je me mets à rire. Elle est marrante, en plus de ça. Moi j'aurais adoré perso, j'ironise en lui lançant un regard lubrique. Non, pour être honnête, c'est vraiment pas mon truc, les plans à plusieurs. Surtout avec autant de personnes que sur la photo.

J'attrape alors tabac, filtres et feuilles, le tout soigneusement posé sur la table de chevet à côté de quelques grammes d'herbe et de mon briquet. Probablement le seul truc à sa place dans cette pièce, enfin. Alors que je finis de rouler une clope et que je commence à l'allumer, la blonde à mes côtés semble avoir une révélation. "Putain je sais d'où j'te connais." Je relève aussitôt la tête, intrigué et impatient de savoir enfin d'où on se connait. "Ta tête me disait quelque chose. T'es pas un pote à Jake ?" Les yeux légèrement écarquillés par la surprise, j'inspire une très longue bouffée. Ah mais ouais. Mais ouais, c'est elle Shay. Le plan cul de Jake. Oh putain. Je crois que je suis dans la merde. Parce que s'il s'est passé quelque chose avec elle, et que Jake l'apprend, je suis foutu. Il est pas vraiment du genre très partageur. Voire pas du tout. Et c'est pas que j'ai peur de me faire cogner - bien au contraire, - c'est surtout que, s'il est tenu au courant de quoi que ce soit, ça risque d'être un bordel monstre. Je grimace alors, mais garde le sourire, trouvant la situation plutôt ironique. Si si, Jake est un très bon pote ouais.. Du coup maintenant je vois mieux qui t'es ! T'es une 'pote' à lui, toi aussi ?, je réponds en accentuant le mot "pote". Non pas qu'elle et moi soyons le même genre de pote pour Jake, hein. C'est juste une manière d'éviter de l'appeler "plan cul", parce que je trouve pas ça franchement distingué. Je tends ensuite mon tabac à Shay et propose de lui rouler une clope.

"Moi j'aurais adoré perso" fait Keith après avoir fini de rire. Je lève les yeux vers lui, haussant un sourcil. Je pouffe. J'le comprends, rien que d'imaginer autant de gens autour de moi, ça me donne la nausée. Surtout vu les gueules de certains sur la photo. Pourtant j'serais du genre à tout essayer. Honnêtement, j'ai jamais eu plus de deux partenaires. M'enfin, vous vous en foutez, hein, j'suppose. Tant pis pour vous. C'très enrichissant vous savez.

- Mmh, tu m'étonnes. Tous ces gens, là. Pour quelques uns tous moins bien foutus les uns que les autres. Arrête tu m'fais envie.

Je regarde avec attention Keith se rouler sa clope. Faut absolument que j'retrouve ma veste. J'vais crever les gars, si j'fume pas dans le quart d'heure qui suit. Je pousse un soupir. Je jette un regard autour, à la recherche de ce qui pourrait ressembler de près ou de loin à ma veste. M'enfin vu la chaleur qu'il devait faire hier soir, j'l'ai quittée certainement bien avant qu'on arrive ici. Du coup j'ai dû l'abandonner je ne sais où, et maintenant j'suis dans la merde. Suffit qu'y ait un petit con qui soit tombé dessus et c'est fini, j'peux dire au revoir à ma veste et à mes clopes. Triste vie. J'suis presque sûre que ce serait le petit con à la grande algue qui lui pendouille sur le crâne. Il a la gueule à chiper les trucs. Chiasse chiasse. Si j'le trouve j'lui en touche un mot.

"Si si, Jake est un très bon pote ouais.. Du coup maintenant je vois mieux qui t'es ! T'es une 'pote' à lui, toi aussi ?" me répond Keith en grimaçant, appuyant bien comme il faut sur le 'pote'. Je ramène mes jambes vers moi comme si j'étais assise en tailleur et me redresse d'un coup. Comme quoi les séances d'abdos avec Monsieur Reid sont efficaces. Si y avait que ça. Brave Monsieur Reid.

- Ouais, c'est ça. Certainement l'une de ses potes qui le connaît le mieux. Bien que j'le soupçonne d'appeler l'une des salopes rousses qui s'écroulent devant lui quand on se frite. Qu'est-ce que je peux pas me les piffrer ces sales chiennes. Bonnes qu'à se mettre à quatre pattes quand on les siffle, je marmonne en serrant les dents.

C'est le premier à râler si j'vais trop voir ailleurs, où que je suis pas à "sa disposition quand il le veut" - j'ai juste une sainte horreur de ça bordel, rien que d'y penser j'ai envie d'envoyer tout en l'air - mais c'est aussi le premier à aller voir les putes quand on s'engueule pour ce genre de choses. Plutôt contradictoire, on est d'accord. J'pense que j'ai bien dû lui en coller une ou deux parce qu'il pensait qu'j'étais l'un de ces poils de carotte, à ses ordres. Faut croire qu'ça a du mal à rentrer. J'acquiesce d'un signe de tête lorsque la grande branche me tend son paquet de tabac.

- Tu me sauves la vie, j'ai tellement envie de fumer. Et vu qu'j'ai paumé ma veste et le haut qu'j'portais hier soir... Il a peut-être fini en lambeaux, lui, d'ailleurs, vu comment ça a l'air d'être le bordel ici, j'fais en désignant la pièce du menton. Ah pfuh, j'imagine à peine la gueule qu'il ferait l'autre, je ricane. Mais à mon avis ce serait pire qu'épique. M'enfin faut-il encore qu'on se soit envoyés en l'air. C'est putain de frustrant ce bordel, je souffle en grattouillant mon tatouage sur ma cheville.

C'est dingue ça, s'être bourrés la gueule au point de pas se rappeler ce qu'on a branlé la nuit-même. J'ai beau essayé de me souvenir, j'vois que dalle. C'est le noir complet dans ma tête. En même temps, vu le mal de crâne, j'pense que niveau réflexion, c'est pas le top du top, tu vois. Je mordille une peau à côté de mon ongle de pouce, rejetant d'un coup de tête quelques mèches venues se mettre devant mes yeux.

- C'est quand même con de pas se rappeler. Ca vaudrait limite le coup de réessayer, pour voir, je lance avec un sourire en coin, me penchant vers lui.